[NS][WiiU] The Legend of Zelda : Breath of the Wild

(ceux qui comptent jouer au jeu, ne lisez pas trop ce message qui suit)

Moi franchement, j'ai aimé l'histoire dans ce Zelda. C'est un scénario qui sonne très Zelda jusqu'au-boutiste. L'histoire est très simple et fait aussi très "conte", mais justement les Zelda ont toujours eu ce côté "conte". Le concept de la princesse "endormie" ou emprisonnée dans un château en ruine et un royaume en ruine délaissés pendant cent ans, ça fait vraiment "La Belle au Bois Dormant" et moi j'aime bien les contes.

Ce qui m'a plu, c'est que ce Zelda reprend pas mal de thématiques de la série, souvent de manière détournée. Ainsi, les concept du monde post-apocalyptique et de l'échec qui lui est associé, c'est un thème récurrent dans la série (Zelda 3 et A Link Between Worlds, Ocarina of Time, Wind Waker). Mais cette fois ils ont adopté le parti-pris de faire un Zelda qui se passe intégralement dans une sorte de "Monde des Ténèbres" ou de "Royaume d'Hyrule sept ans plus tard", tandis que le "premier monde" (le royaume d'Hyrule cent ans plus tôt) est une sorte de souvenir évanescent du passé.

C'est aussi la première fois qu'un Zelda nous fait incarner un Link qui a véritablement un passé héroïque d'élu, mais qui a tout oublié alors que tout le monde soit le connaît physiquement, soit a déjà entendu parler d'un Héros de la Légende qui a accompli des prodiges cent ans plus tôt sans forcément savoir que c'est ce même Link qui se tient devant eux, soit au contraire qui le savent mais ne le disent pas explicitement (comme Asarim) ou ne veulent pas le croire (comme le chef Piaf). J'ai trouvé que c'était une super idée (de même que le concept des souvenirs à retrouver).

On retrouve aussi le concept des "Sages" qui épaulent Link et Zelda, dorénavant appelés "Prodiges". On retrouve ainsi chez eux certains archétypes auxquels on a été habitué dans la série comme le chef Goron qui est très fort et s'apparente à un "pote" pour le joueur (comme Darunia dans Ocarina of Time) ou la princesse Zora amoureuse de Link (comme Ruto dans Ocarina of Time), et au contraire on a d'autres archétypes un peu nouveaux dans les sages de la série comme le Piaf "rival" et arrogant (à la Falco) ou la chef Gerudo qui adopte cette fois une figure maternelle bienveillante. Mais cette fois ce sont des fantômes du passé, des figures évanescentes qui sont le reflet de leur propre échec ainsi que de l'échec de Link et de Zelda cent ans plus tôt. Ce Zelda reprend un petit le concept de Wind Waker avec ses sages du passé et leur passation de pouvoir avec leurs successeurs, mais en poussant l'idée plus loin que Wind Waker.

Enfin, comme je l'ai dit plusieurs fois, le monde de Breath of the Wild en lui-même raconte une histoire. Rien qu'au début on voit un Temple du Temps en ruine, malgré tout toujours debout, avec plein de machines étranges cassées dont on imagine qu'elles sont la cause de la ruine du Royaume. Et en même temps on se dit "mais c'est bizarre, pourquoi le temple du temps n'est-il pas complètement détruit alors que les machines sont juste à côté ? C'est bizarre, cette position peu naturelle des machines qui semblent avoir été comme interrompues". Plus tard, je déambule dans le Royaume d'Hyrule en ruine mais qui semble avoir retrouvé un certain apaisement avec la Nature qui a repris ses droits. Je tombe par hasard sur un voyageur qui me raconte quelques détails sur la région où je me trouve.

Je remarque que le centre du Royaume semble beaucoup plus détruit que ses périphéries qui sont davantage épargnées par la destruction : là encore, je comprends par moi-même que le cataclysme est parti du centre du royaume, qu'il a essayé de se propager mais que pour une raison inconnue la destruction semble avoir été interrompue avant de toucher tout le royaume (parce que quand on voit la Citadelle pratiquement rasée, il n'y avait pas de raison qu'il n'en soit pas de même partout ailleurs).

Quand on va à Akkala, on voit une énorme forteresse qui semble inexpugnable et est envahie par des Gardiens volants, avec un pont détruit et en contre-bas une immense étendue remplie de carcasses de Gardiens. Et bien on imagine tout à fait qu'il s'est produit une bataille dans la région et que la forteresse a sûrement été assiégée avant d'être finalement prise après un combat acharné et tout le monde a dû mourir. Un voyageur dans le coin nous confirme aussi ce qu'on pensait en nous donnant quelques détails supplémentaires. Je ne suis pas sûr que l'ajout d'une cinématique qui montre le siège d'Akkala et la bataille aurait été nécessaire alors que l'imagination du joueur fait le reste.

Je tombe sur un village très paisible et verdoyant aux confins du Royaume d'Hyrule. Leurs habitants me disent qu'il y a un siècle il s'est passé une catastrophe mais que le village a été très peu touché, donc il s'est vite remis. Quand je visite les environs, à un moment je tombe sur une grande plaine remplie de carcasses de Gardiens, avec une muraille mal menée mais toujours debout : et bien on comprend que cet endroit était autrefois un champ de bataille, qu'il y a sûrement eu un siège et que cette muraille était destinée à protéger le village. On tombe sur un voyageur qui donne quelques détails sur des héros et en particulier un chevalier qui a donné sa vie pour protéger Elimith : et bien voilà, on comprend maintenant pourquoi le village Elimith a été très peu touché et s'est vite remis. Pas besoin de plus. Et je me suis vraiment senti ému par cet endroit (où je suis souvent passé sans comprendre au départ) quand je me suis rendu compte de ce qui s'est réellement passé, que j'ai deviné avant de voir la confirmation de ce que je pensais.

Et à côté de ça, on voit plein de ruines ou de vestiges qui dénotent par rapport au reste, qui nous font comprendre que c'est encore plus vieux que les ruines d'il y a cent ans. J'ai beaucoup pensé à Shadow of the Colossus, bien sûr. Je voyage, je tombe par hasard sur un Piaf troubadour qui nous raconte une légende vieille de 10 000 ans. Ce dernier nous parle beaucoup par énigmes. A la longue, on comprend que nous sommes en train de rejouer une légende vieille de 10 000 ans, que nous refaisons les mêmes épreuves que le Héros d'il y a 10 000 ans et le dénouement de la quête d'Asarim achève d'émouvoir le joueur en nous faisant comprendre bien des choses de ce qui s'est passé il y a 100 ans et qui met en lumière tout l'intérêt de la mise à l'épreuve du Héros via les énigmes environnementales et les sanctuaires pour qu'il soit prêt face à la menace ultime.

Même quand je visite le désert, je tombe sur plein de squelettes énormes un peu étrange, qui font un peu "baleine". Puis je rencontre plusieurs moldalquors. Bon, voilà, on peut se dire que ce sont des squelettes de moldalquors, tout simplement.

Quant au château, lui aussi il a été vraiment bossé pour raconter une histoire, à travers ses décors ou ses journaux. Même le bouclier de Hylia est très bien intégré vu qu'on combat un squelette géant de Hinox, on ramasse le bouclier, et derrière on lit quelque chose comme "tout candidat qui arrivera à terrasser un monstre géant deviendra un chevalier" : bah voilà, la récompense du bouclier de Hylia fait complètement sens, c'est cohérent !

Enfin, je dois être le seul à avoir aimé la fin, mais elle m'a tout à fait convenu. J'ai bien aimé le côté simple du dénouement. On voit :

C'est simple, mais ça marche, pas besoin de davantage de fioritures.

Et encore une fois, je dois être le seul, mais moi j'ai aimé Ganon. Au départ on est choqué par les boss qu'on affronte dans les Créatures Divines, puis on se rend compte qu'en fait il y a une vraie cohérence de design :

Le design des boss fait un peu polémique, mais bon, cette fois on ne va quand même pas dire à Zelda d'avoir un design "monstres pour enfants" façon pieuvre de Skyward Sword. Même chose pour Ganon d'ailleurs, il y a une vraie prise de risque pour casser un peu les codes de la série :

On a un design bien démoniaque et inquiétant, voire dégénéré, à l'image de ce qu'est devenu Ganon : un amoncellement de haine et de destruction.

Après, je n'aurais pas craché contre davantage de boss, mais en l'état le design des boss qu'on affronte ne me choque plus.

Franchement, je trouve que le jeu a vraiment été bossé sur son univers, son background, son monde ouvert et sa narration environnementale qui fait travailler l'imagination du joueur (un aspect qui commençait déjà à apparaître dans Skyward Sword justement), donc il a été bien bossé sur son scénario de manière globale. Je ne pense pas que tout le monde s'en rend compte.

Cependant, je comprends tout à fait que ça ne plaise pas à tout le monde, surtout si on aimé Twilight Princess. Mais Twilight Princess, c'est encore autre chose, c'est un autre style : c'est une sorte de "ride" intense, une épopée, donc sa narration n'est pas la même. Ca ne m'a pas empêché de beaucoup aimer aussi le parti-pris de Twilight Princess qui m'avait vraiment embarqué du début à la fin, mais c'est un autre style dans Breath of the Wild qui m'a plu tout autant (voire un peu plus).