C'est le second point que tu trouves le plus crédible scientifiquement ?
J'ai envie de dire "oui". En effet, le premier point (le voyage Mars-Neptune) entre en contradiction totale avec la durée du voyage Lune-Mars du film (environ quatre semaines) : avec la même technologie de vaisseau, il est impossible de mettre "seulement" 80 jours pour aller jusqu'à Neptune, mais plutôt quatre ans minimum. Donc pour que ce voyage de 80 jours soit crédible au vu de la technologie des vaisseaux du film, il aurait fallu que le voyage Lune-Terre dure un ou deux jours, pas quatre semaines. Quant au second point, jusqu'à preuve du contraire, on ne sait pas ce qui se passe quand on va dans un trou noir car, certes, la relativité générale prédit une "singularité", mais à l'échelle d'un trou noir, il faudrait tenir compte des effets quantiques. Or, personne ne fait vraiment faire à la fois de la relativité générale et de la mécanique quantique pour savoir ce qui se passerait réellement si on va dans un trou noir : du coup, il y a plusieurs théories scientifiques, et le film en présente une (celle de l'astrophysicien Kip Thorne qui a travaillé comme consultant scientifique du film).
Ainsi, ton premier point relève d'une contradiction flagrante (et ce n'est pas la petite incohérence qui se révèle insignifiante, non non, c'est quand même un gros détail qui met à mal la crédibilité du scénario) par rapport à ce qui est montré dans le film (c'est-à-dire des fusées dignes de la mission Apollo de 1969), tandis que ton second relève certes d'une "anticipation" mais s'appuie sur une théorie scientifique sérieuse. Moi, ça me gêne beaucoup, quand même : ça m'a définitivement fait sortir du film (bon, tu me diras, Sunshine a fait encore pire : rien que son introduction et son histoire de "Soleil qui s'éteint et qu'il faut ranimer avec des bombes thermonucléaires" m'avait fait sortir du film XD ).
Dans ce genre de film de Hard-SF (qui se veut relativement sérieux et réaliste), j'ai besoin de croire en ce qui se passe avec un minimum d'incohérences (ou que ces dernières ne soient pas gênantes pour le scénario), sinon, c'est mort. Si c'est de la "SF fantaisiste" à la Star Wars, je m'en fous complètement, je n'ai aucune exigence à ce niveau-là. Mais si c'est de la "Hard SF" (donc de la "SF réaliste"), c'est comme ça, je suis exigeant en la matière et je ne pardonne pas certains "détails".
Bon on se mettra pas d'accord mais je ne suis toujours pas convaincu.
C'est quand même curieux ta façon de réfléchir.
Ad Astra c'est pas crédible pour les raisons scientifiques que tu avances et pour lesquelles je dois avouer ne rien y connaître.
Et de l'autre côté Interstellar c'est plus crédible parce qu'en fait on en sait rien et que y a juste un mec qui a fait des suppositions invérifiables en l'état.
Mais du coup, si jamais on arrive enfin à rentrer dans un trou noir, est-ce qu'il faut que je laisse une bibliothèque dans la chambre de ma fille et que je lui apprenne le morse où tu penses qu'il y aura d'autres mieux de communiquer dans les failles spatio-temporelles ?^^
Interstellar je m'en souviens vaguement, c'est du Nolan qui s'immisce, comme d'hab', dans des concepts métaphysiques qui le dépassent sous couvert d'une "dimension réaliste" totalement frimeuse. En clair, c'est le paradoxe : un film simple, mais étrangement trop conceptuel pour son réalisateur, autant que l'était TDKR d'ailleurs (et Inception j'en parle même pas). Le film pétait plus haut que son cul en faisant l'apologie de la recherche scientifique sans laisser au spectateur le temps de s'émerveiller devant les astres. Franchement, j'en ai un peu ras-le-bol du naturalisme outrancier de la sorte : pas besoin de se la péter en mode "coucou, j'ai réalisé ça avec un consultant scientifique" quand le film ne laisse nullement la place à la suggestivité. En tout cas, la mise en scène n'a pas profité un seul instant de toutes ces recherches scientifiques.
Au contraire, Ad Astra s'en sort plutôt bien niveau SF et symbolise la quête métaphysique de Brad Pitt à travers un voyage aux confins du système solaire. Cette quête prend le dessus par rapport à celle de la place de l'Homme dans l'univers et c'est rudement bien mis en scène, je dois l'admettre. Le film s'affranchit de tous les détails superflus d'ordre scientifique et va à l'essentiel : pourquoi le fustiger là-dessus ? Il n'a jamais la prétention de faire de la hard-SF : c'est une fable existentialiste sur le temps qui passe ou sur la solitude. Pour le coup, je suis d'accord avec la critique des Cahiers du Cinéma qui évoque Herzog et Coppola... C'est exactement ça en plus : Ad Astra offre la dimension théologique d'Herzog et la dissertation temporelle de Coppola.
En tout cas en SF, je préfère quand le film prend des allures de conte et soigne sa mise en scène, quitte à rester tacite sur certaines données d'ordre réaliste. Pour ça que je préfère largement le très sous-estimé Mission to Mars à Interstellar : c'est du Brian de Palma, déjà et son jeu sur l'infiniment grand et l'infiniment petit expose un récit étonnement plus "vrai" que ce que fait Interstellar. Et pour revenir à Ad Astra, ce film n'a rien de grandiloquent contrairement à ce qu'était Interstellar. Et puis, autre chose pour terminer : la partition de Max Richter est infiniment plus efficace que le truc dégueulasse qu'a pondu ce tâcheron de Hans Zimmer.
Ah oui tiens, niveau matériel : rien ne m'a choqué car il faut bien un moteur fusée classique pour s'extirper de l'atmosphère. Je ne vois pas le souci. J'ai un pote autiste qui dessine des vaisseaux spatiaux avec une volonté réaliste qui dépasse tout ce que vous avez pu lire dans vos revues d'universitaire et il fout encore des roues en caoutchouc à ses trucs subluminiques juste parce que : "bah tout ce qui est antimatière etc. ça consomme donc ce qu'il y a de mieux au sol ce sont les roues". Donc partant de là, je me dis que c'est pareil pour les fusées : on consomme du carburant lors de la mise en orbite et ensuite on utilise une autre technologie. Et là-dessus, Ad Astra reste silencieux et c'est tant mieux : pas besoin de noyer le spectateur sous un tas de jargon scientifique incompréhensible... et inutile. Rien à foutre que Brad Pitt traverse le système solaire à une vitesse supraluminique, perso. En fait non, je sais pas compter mais bref rien de choquant. 555 km/s à peu près, ça me parait plausible (et au pire encore une fois je m'en tamponne total si c'est pas réaliste).
(en tout cas les plans avec Neptune en fond sont magnifiques)
Ouf !
Enfin !
Que ça fait du bien de lire ça !
Merci, Trikounet.
Et merci, GreenSnake, pour tes nouveaux rapports filmiques.
Le prof, dans L'Ange Bleu, fait le film à lui tout seul.
La fin, putain, la fin...
C'est comme la fameuse scène du Kid où on lui enlève l'enfant.
A chaque fois je chiale sur ces deux films.
Ad Astra c'est pas crédible pour les raisons scientifiques que tu avances et pour lesquelles je dois avouer ne rien y connaître.
Et de l'autre côté Interstellar c'est plus crédible parce qu'en fait on en sait rien et que y a juste un mec qui a fait des suppositions invérifiables en l'état.
Je ne vois pas ce qu'il y a de curieux dans ce que je dis. Je vais donner d'autres exemples :
- on nous propose un film très réaliste sur la vie des hommes préhistoriques. Au début, tout va bien, on y croit, quand, tout à coup, au milieu du film, on les voit se faire attaquer par un T-Rex ! Forcément, ça choque, ça fait sortir du film, on n'y croit plus du tout ;
- de même, on nous propose un film qui tente de reconstituer de manière fidèle la Rome Antique de Jules César. Tout va bien au début, on s'y croirait, quand, tout à coup, on nous parle d'une attaque de Huns menée par Attila ! Là, pareil, c'est une grosse erreur, on n'y croit plus du tout.
Et bien pour Ad Astra, c'est pareil : on nous propose un film de SF qui se veut réaliste, ils s'emmerdent à faire de l'apesanteur, ils nous proposent un voyage relativement "long" entre la Lune et Mars (quatre semaines, c'est moins long que ce qu'on pourrait faire maintenant, mais vu que c'est de la SF, on peut effectivement admettre une technologie plus avancée). Au début, tout va bien, quand, tout à coup, on nous propose un voyage de 80 jours de Mars à Neptune (ce qui entre en contradiction flagrante avec le voyage Lune-Mars du film) : non, désolé, moi ça me casse complètement le délire, je sors du film, ce n'est pas possible que je crois à ce qui se passe. C'est une erreur aussi grossière que de mettre un T-Rex dans un film réaliste d'hommes préhistoriques ou Attila dans un film réaliste sur Jules César. Ca ne choquera évidemment pas ceux qui ne connaissent pas grand chose à la préhistoire, à l'histoire ou à la science, mais si on s'y connaît un minimum et qu'on a affaire à un film qui se veut "sérieux" et "réaliste" à ce sujet, il y a des choses qui ne pardonnent pas.
Par contre, si on a affaire à un film qui nous dit d'entrée de jeu (de manière implicite, ou non) qu'il n'a pas pour vocation d'être réaliste, là on s'en fout, de ce genre de détail, ils peuvent faire ce qu'ils veulent, ce qui n'est pas le cas de Ad Astra.
GreenSnake a écrit:
Et de l'autre côté Interstellar c'est plus crédible parce qu'en fait on en sait rien et que y a juste un mec qui a fait des suppositions invérifiables en l'état.
En l'occurrence, oui : à partir du moment où on n'a pas encore les moyens de vérifier une théorie (qui est quand même sérieuse, hein ! ), on peut toujours imaginer un futur dans lequel on a les moyens de la vérifier, donc concevoir un film de SF dans lequel les prédictions de cette théorie sont exactes. Ainsi, le film s'avère crédible dans le cadre de cette théorie, là où Ad Astra n'est pas crédible dans son voyage spatial par rapport à ce qu'il nous avait montré jusqu'à maintenant.
Trikounet a écrit:
Le film pétait plus haut que son cul en faisant l'apologie de la recherche scientifique sans laisser au spectateur le temps de s'émerveiller devant les astres.
Je ne vois pas en quoi le fait qu'un film présente des aspects de la recherche scientifique, et ce de manière intelligente (pour une fois dans un film de SF ! ), dans le but de servir le scénario du film, ce serait "péter plus haut que son cul".
Si tu veux vraiment un "film de SF qui pète plus haut que son cul", j'en ai un bon exemple : Sunshine, qui avait pour ambition de "succéder à 2001 : L'Odyssée de l'Espace" (rien que ça ! Au passage, 2001 était bien plus rigoureux scientifiquement que Sunshine), qui faisait lui-même appel au physicien Brian Cox pour se donner une "caution scientifique"... qu'il n'a pas, étant donné qu'il est rempli d'énormités et d'invraisemblances (et lui, pour le coup, essaie de nous bassiner de pseudo-explications scientifiques pompeuses et risibles, contrairement à Interstellar qui n'emmerde pas le specateur avec ça et laisse au contraire place à l'émerveillement, mais dans un cadre crédible). Et après ils se sont étonnés que toute la communauté scientifique leur est tombé dessus (alors qu'ils ont juste donné le bâton pour se faire battre).
Et au contraire, j'ai été émerveillé par bien des passages du film (quand ils franchissent le trou de ver, qu'ils découvrent une nouvelle planète, et qu'on voit ce raz-de-marée gigantesque - qui est crédible scientifiquement, par-dessus le marché). De même, j'ai bien aimé la bande-son de Hans Zimmer.
De même, j'ai bien aimé la bande-son de Hans Zimmer.
Cet ambient qui constitue du sous-Philip Glass là ? Étalonné et mixé à la truelle avec, en prime, une partition dégueulasse ? Eh beh... En tout cas moi je ne peux pas blairer Zimmer et sa fameuse tonitruance.
Citation:
Je ne vois pas en quoi le fait qu'un film présente des aspects de la recherche scientifique, et ce de manière intelligente (pour une fois dans un film de SF ! ), dans le but de servir le scénario du film, ce serait "péter plus haut que son cul".
Pour Sunshine je sais pas, je n'aime pas ce film : je me suis emmerdé devant et j'ai tellement tout oublié que je ne pourrai pas en parler.
Sinon pour Intestellar bah ses trucs scientifiques il les présente en se la pétant justement (c'est du Nolan après tout donc rien d'étonnant). C'est justement parce que ça ne sert nullement la mise en scène et que ça charge le scénario de trucs superflus que ça en fait un truc pompeux. Au contraire, ça n'est pas fait intelligemment : c'est mal branlé. J'ai rien contre l'aspect réaliste de certaines œuvres mais quand ça sert à rien je dis non. Encore une fois, je préfère un million de fois le jeu des grandeurs proposé par un Mission to Mars qui s'affranchissait pourtant de toute la partie décollage de la fusée (et je parle même pas de la fin tarabiscotée). Parce que ça symbolisait bien plus la grandeur d'un voyage spatial que ce qu'Intestellar faisait en mettant en place ce silence après le décollage. Et puis surtout parce que c'est du De Palma et que je le préfère à Nolan : De Palma a mille fois plus de talent que Nolan. Et 2001 était monté comme une fable métaphysique donc là c'était encore pire : je n'ai pas fait gaffe un seul instant au réalisme de l'oeuvre.
Sinon, pour la planète avec le raz-de-marée dans Interstellar, en fait il a juste repompé des plans de Solaris de Tarkovski. Et pour le trou de ver c'est plutôt à prendre du côté de chez Cameron avec Abyss.
Sinon pour Intestellar bah ses trucs scientifiques il les présente en se la pétant justement (c'est du Nolan après tout donc rien d'étonnant).
Pas d'accord du tout, je le trouve "humble" au contraire, mais bon, on ne sera pas d'accord visiblement. ^^
Citation:
C'est justement parce que ça ne sert nullement la mise en scène et que ça charge le scénario de trucs superflus que ça en fait un truc pompeux. Au contraire, ça n'est pas fait intelligemment : c'est mal branlé. J'ai rien contre l'aspect réaliste de certaines œuvres mais quand ça sert à rien je dis non.
Non, je suis désolé, pour moi tu es en train de dire une énormité, je ne peux pas te laisser dire ça, parce que j'estime que ce que tu dis est faux (peut-être par méconnaissance du sujet et de la physique) :
Spoiler ▼▲
- le fait que le temps s'écoule plus lentement en présence d'un champ gravitationnel très fort sert au scénario quand on voit que l'astronaute resté dans le vaiseau en orbite a beaucoup vieilli (et ça, c'est vrai, c'est de la "relativité générale", cela a été vérifié par l'expérience à maintes reprises) ;
- le fait que la présence d'un trou noir à proximité génère un énorme champ gravitationnel sert également au scénario quand on voit arriver un énorme raz-de-marée, ce qui donne lieu à une scène spectaculaire pour le spectateur (là encore, c'est crédible, scientifiquement) ;
- l'usage de la force centrifuge pour générer une gravité artificielle implique que le "paysage" qu'on voit à travers le hublot doit défiler, ce qu'on observe effectivement et donne lieu à un effet de mise en scène sympa ;
- et enfin, toute la théorie de Kip Thorne, cette histoire de "dimensions supplémentaires", de "tesseract" et de "bulk", cela constitue le COEUR du scénario !
Bref, le film a été très réfléchi, il utilise pas mal d'éléments scientifiques au service du scénario et de la mise en scène, et sans que ce soit "prétentieux" ni "pompeux" (sinon, autant dire que n'importe quel film qui cherche à présenter des faits scientifiques "pèterait forcément plus haut que son cul", chose à laquelle je suis en désaccord total).
Trikounet a écrit:
Et 2001 était monté comme une fable métaphysique donc là c'était encore pire : je n'ai pas fait gaffe un seul instant au réalisme de l'oeuvre.
C'est ton droit. Moi aussi j'aime beaucoup le côté "fable métaphysique", mais j'aime aussi son "réalisme", ce qui lui donne quelque chose en plus, une qualité supplémentaire. De même, un autre spectateur a le droit de ne pas être intéressé par le réalisme historique mais de juste aimer un "film historique" pour son côté "évasion" (tandis que les "connaisseurs" apprécieront à la fois ce côté "émerveillement" ou "évasion", mais aussi son "réalisme historique").
Les deux dernières oeuvres cinématographiques que j'ai vu récemment sont :
The Dead Don't Die de Jim Jarmusch, sans même bien connaître le réalisateur, on devine facilement que c'est lui du moment que vous avez-vu Only Lovers Left Alive, les deux films sont issuent d'un même délire hipster sous sédatif, qui ne racontent rien mais qui offrent une ambiance intéressante.
The Dark Crystal : Age of Resistance, excellent ! Un côté nostalgique étant donné que j'avais la VHS du film à l'époque, c'est un vent de fraîcheur avec de la créativité et passé le 2ème épisode, on lâche plus. La Saison 2 n'a pas encore été totalement approuvé, et ne devrait pas sortir avant 2021-2022, comme la saison 3 de Mindhunter.
Non, je suis désolé, pour moi tu es en train de dire une énormité, je ne peux pas te laisser dire ça, parce que j'estime que ce que tu dis est faux (peut-être par méconnaissance du sujet et de la physique) :
Ah non mais c'est pas de la méconnaissance ni une énormité, j'ai juste eu le sentiment d'être surchargé d'informations inutiles qui faisaient passer Interstellar pour un truc pédant qui ne laissait nullement la place au suggestif. Ce qu'il dit est peut-être vrai, ça n'est pas le plus important pour moi. Mais je n'ai pas envie d'aller voir un exposé scientifique s'il n'y a rien derrière. Et Intestellar c'est ça : un truc (pseudo) naturaliste mais trop conceptuel pour son réalisateur, comme l'ont été Inception et TDKR encore une fois. Ce mec essaye d'instaurer une dimension "spielbergienne" à ses personnages mais il se foire avec le trop plein d'argumentations scientifiques. En boulimique de savoir, il oublie presque — oui "presque" car il y a pire, hein, je l'ai juste trouvé moyen, pas nul — de faire du cinéma : le plus important.
Et je vais te prouver que ce que je dis n'a rien à voir avec un quelconque mépris pour tout ce qui oserait offrir du réalisme à ne plus savoir quoi en faire. Moonwalk One : grand film un peu docu/expérimental qui est ultra réaliste scientifiquement (mille fois plus que ton Interstellar ; enfin en même temps c'est documenté par Aldrin et compagnie). Pourquoi là ça marche et pas dans Interstellar ? Bah parce que le réalisateur sait y faire et sait transcender son naturalisme pour faire bien plus que du naturalisme. Ainsi, le documentaire se change en cinéma. Et voilà le problème avec Interstellar : s'il est naturaliste (et encore une fois, j'émets quelques doutes bien que n'étant pas assez calé en physique pour le dire), il est alors juste naturaliste et pas grand chose de plus. Le plus drôle c'est que les seules fois où il s'est voulu contemplatif c'est quand il s'abstenait de toute logorrhée scientifique en empruntant des éléments à d'autres films parus avant lui.
Filmer le réalisme histoire de mettre en avant une portée réaliste/naturaliste et rien de bien plus bah... je zappe. Et ça a beau "servir" le scénario — là encore, j'en doute —, ça oublie de servir la mise en scène.
Sinon semaine prochaine j'irai peut-être voir le dernier Rambo, tiens, juste comme ça.
Je trouve justement que le film Interstellar échappe au côté "exposé scientifique" et n'assomme pas le spectateurs d'explications (il ne tombe pas dans ce piège dont sont victimes d'autres films de SF), qu'il laisse de la place au suggestif, à l'émotion et à l'émerveillement, avec un vrai talent de mise en scène et de bons acteurs. C'est du vrai cinéma. Et même chose pour Inception qui m'a beaucoup marqué. J'estime que les films de Nolan font partie de ce qui s'est fait de mieux dans la décennie.
J'ai envie de dire "oui". En effet, le premier point (le voyage Mars-Neptune) entre en contradiction totale avec la durée du voyage Lune-Mars du film (environ quatre semaines) : avec la même technologie de vaisseau, il est impossible de mettre "seulement" 80 jours pour aller jusqu'à Neptune, mais plutôt quatre ans minimum. Donc pour que ce voyage de 80 jours soit crédible au vu de la technologie des vaisseaux du film, il aurait fallu que le voyage Lune-Terre dure un ou deux jours, pas quatre semaines. Quant au second point, jusqu'à preuve du contraire, on ne sait pas ce qui se passe quand on va dans un trou noir car, certes, la relativité générale prédit une "singularité", mais à l'échelle d'un trou noir, il faudrait tenir compte des effets quantiques. Or, personne ne fait vraiment faire à la fois de la relativité générale et de la mécanique quantique pour savoir ce qui se passerait réellement si on va dans un trou noir : du coup, il y a plusieurs théories scientifiques, et le film en présente une (celle de l'astrophysicien Kip Thorne qui a travaillé comme consultant scientifique du film).
Ainsi, ton premier point relève d'une contradiction flagrante (et ce n'est pas la petite incohérence qui se révèle insignifiante, non non, c'est quand même un gros détail qui met à mal la crédibilité du scénario) par rapport à ce qui est montré dans le film (c'est-à-dire des fusées dignes de la mission Apollo de 1969), tandis que ton second relève certes d'une "anticipation" mais s'appuie sur une théorie scientifique sérieuse. Moi, ça me gêne beaucoup, quand même : ça m'a définitivement fait sortir du film (bon, tu me diras, Sunshine a fait encore pire : rien que son introduction et son histoire de "Soleil qui s'éteint et qu'il faut ranimer avec des bombes thermonucléaires" m'avait fait sortir du film XD ).
Dans ce genre de film de Hard-SF (qui se veut relativement sérieux et réaliste), j'ai besoin de croire en ce qui se passe avec un minimum d'incohérences (ou que ces dernières ne soient pas gênantes pour le scénario), sinon, c'est mort. Si c'est de la "SF fantaisiste" à la Star Wars, je m'en fous complètement, je n'ai aucune exigence à ce niveau-là. Mais si c'est de la "Hard SF" (donc de la "SF réaliste"), c'est comme ça, je suis exigeant en la matière et je ne pardonne pas certains "détails".
Bon on se mettra pas d'accord mais je ne suis toujours pas convaincu.
C'est quand même curieux ta façon de réfléchir.
Ad Astra c'est pas crédible pour les raisons scientifiques que tu avances et pour lesquelles je dois avouer ne rien y connaître.
Et de l'autre côté Interstellar c'est plus crédible parce qu'en fait on en sait rien et que y a juste un mec qui a fait des suppositions invérifiables en l'état.
Mais du coup, si jamais on arrive enfin à rentrer dans un trou noir, est-ce qu'il faut que je laisse une bibliothèque dans la chambre de ma fille et que je lui apprenne le morse où tu penses qu'il y aura d'autres mieux de communiquer dans les failles spatio-temporelles ?^^
Sell kids for food
Interstellar je m'en souviens vaguement, c'est du Nolan qui s'immisce, comme d'hab', dans des concepts métaphysiques qui le dépassent sous couvert d'une "dimension réaliste" totalement frimeuse. En clair, c'est le paradoxe : un film simple, mais étrangement trop conceptuel pour son réalisateur, autant que l'était TDKR d'ailleurs (et Inception j'en parle même pas). Le film pétait plus haut que son cul en faisant l'apologie de la recherche scientifique sans laisser au spectateur le temps de s'émerveiller devant les astres. Franchement, j'en ai un peu ras-le-bol du naturalisme outrancier de la sorte : pas besoin de se la péter en mode "coucou, j'ai réalisé ça avec un consultant scientifique" quand le film ne laisse nullement la place à la suggestivité. En tout cas, la mise en scène n'a pas profité un seul instant de toutes ces recherches scientifiques.
Au contraire, Ad Astra s'en sort plutôt bien niveau SF et symbolise la quête métaphysique de Brad Pitt à travers un voyage aux confins du système solaire. Cette quête prend le dessus par rapport à celle de la place de l'Homme dans l'univers et c'est rudement bien mis en scène, je dois l'admettre. Le film s'affranchit de tous les détails superflus d'ordre scientifique et va à l'essentiel : pourquoi le fustiger là-dessus ? Il n'a jamais la prétention de faire de la hard-SF : c'est une fable existentialiste sur le temps qui passe ou sur la solitude. Pour le coup, je suis d'accord avec la critique des Cahiers du Cinéma qui évoque Herzog et Coppola... C'est exactement ça en plus : Ad Astra offre la dimension théologique d'Herzog et la dissertation temporelle de Coppola.
En tout cas en SF, je préfère quand le film prend des allures de conte et soigne sa mise en scène, quitte à rester tacite sur certaines données d'ordre réaliste. Pour ça que je préfère largement le très sous-estimé Mission to Mars à Interstellar : c'est du Brian de Palma, déjà et son jeu sur l'infiniment grand et l'infiniment petit expose un récit étonnement plus "vrai" que ce que fait Interstellar. Et pour revenir à Ad Astra, ce film n'a rien de grandiloquent contrairement à ce qu'était Interstellar. Et puis, autre chose pour terminer : la partition de Max Richter est infiniment plus efficace que le truc dégueulasse qu'a pondu ce tâcheron de Hans Zimmer.
Ah oui tiens, niveau matériel : rien ne m'a choqué car il faut bien un moteur fusée classique pour s'extirper de l'atmosphère. Je ne vois pas le souci. J'ai un pote autiste qui dessine des vaisseaux spatiaux avec une volonté réaliste qui dépasse tout ce que vous avez pu lire dans vos revues d'universitaire et il fout encore des roues en caoutchouc à ses trucs subluminiques juste parce que : "bah tout ce qui est antimatière etc. ça consomme donc ce qu'il y a de mieux au sol ce sont les roues". Donc partant de là, je me dis que c'est pareil pour les fusées : on consomme du carburant lors de la mise en orbite et ensuite on utilise une autre technologie. Et là-dessus, Ad Astra reste silencieux et c'est tant mieux : pas besoin de noyer le spectateur sous un tas de jargon scientifique incompréhensible... et inutile.
Rien à foutre que Brad Pitt traverse le système solaire à une vitesse supraluminique, perso.En fait non, je sais pas compter mais bref rien de choquant. 555 km/s à peu près, ça me parait plausible (et au pire encore une fois je m'en tamponne total si c'est pas réaliste).(en tout cas les plans avec Neptune en fond sont magnifiques)
Ouf !
Enfin !
Que ça fait du bien de lire ça !
Merci, Trikounet.
Et merci, GreenSnake, pour tes nouveaux rapports filmiques.
Le prof, dans L'Ange Bleu, fait le film à lui tout seul.
La fin, putain, la fin...
C'est comme la fameuse scène du Kid où on lui enlève l'enfant.
A chaque fois je chiale sur ces deux films.
Je ne vois pas ce qu'il y a de curieux dans ce que je dis. Je vais donner d'autres exemples :
- on nous propose un film très réaliste sur la vie des hommes préhistoriques. Au début, tout va bien, on y croit, quand, tout à coup, au milieu du film, on les voit se faire attaquer par un T-Rex ! Forcément, ça choque, ça fait sortir du film, on n'y croit plus du tout ;
- de même, on nous propose un film qui tente de reconstituer de manière fidèle la Rome Antique de Jules César. Tout va bien au début, on s'y croirait, quand, tout à coup, on nous parle d'une attaque de Huns menée par Attila ! Là, pareil, c'est une grosse erreur, on n'y croit plus du tout.
Et bien pour Ad Astra, c'est pareil : on nous propose un film de SF qui se veut réaliste, ils s'emmerdent à faire de l'apesanteur, ils nous proposent un voyage relativement "long" entre la Lune et Mars (quatre semaines, c'est moins long que ce qu'on pourrait faire maintenant, mais vu que c'est de la SF, on peut effectivement admettre une technologie plus avancée). Au début, tout va bien, quand, tout à coup, on nous propose un voyage de 80 jours de Mars à Neptune (ce qui entre en contradiction flagrante avec le voyage Lune-Mars du film) : non, désolé, moi ça me casse complètement le délire, je sors du film, ce n'est pas possible que je crois à ce qui se passe. C'est une erreur aussi grossière que de mettre un T-Rex dans un film réaliste d'hommes préhistoriques ou Attila dans un film réaliste sur Jules César. Ca ne choquera évidemment pas ceux qui ne connaissent pas grand chose à la préhistoire, à l'histoire ou à la science, mais si on s'y connaît un minimum et qu'on a affaire à un film qui se veut "sérieux" et "réaliste" à ce sujet, il y a des choses qui ne pardonnent pas.
Par contre, si on a affaire à un film qui nous dit d'entrée de jeu (de manière implicite, ou non) qu'il n'a pas pour vocation d'être réaliste, là on s'en fout, de ce genre de détail, ils peuvent faire ce qu'ils veulent, ce qui n'est pas le cas de Ad Astra.
En l'occurrence, oui : à partir du moment où on n'a pas encore les moyens de vérifier une théorie (qui est quand même sérieuse, hein ! ), on peut toujours imaginer un futur dans lequel on a les moyens de la vérifier, donc concevoir un film de SF dans lequel les prédictions de cette théorie sont exactes. Ainsi, le film s'avère crédible dans le cadre de cette théorie, là où Ad Astra n'est pas crédible dans son voyage spatial par rapport à ce qu'il nous avait montré jusqu'à maintenant.
Je ne vois pas en quoi le fait qu'un film présente des aspects de la recherche scientifique, et ce de manière intelligente (pour une fois dans un film de SF ! ), dans le but de servir le scénario du film, ce serait "péter plus haut que son cul".
Si tu veux vraiment un "film de SF qui pète plus haut que son cul", j'en ai un bon exemple : Sunshine, qui avait pour ambition de "succéder à 2001 : L'Odyssée de l'Espace" (rien que ça ! Au passage, 2001 était bien plus rigoureux scientifiquement que Sunshine), qui faisait lui-même appel au physicien Brian Cox pour se donner une "caution scientifique"... qu'il n'a pas, étant donné qu'il est rempli d'énormités et d'invraisemblances (et lui, pour le coup, essaie de nous bassiner de pseudo-explications scientifiques pompeuses et risibles, contrairement à Interstellar qui n'emmerde pas le specateur avec ça et laisse au contraire place à l'émerveillement, mais dans un cadre crédible). Et après ils se sont étonnés que toute la communauté scientifique leur est tombé dessus (alors qu'ils ont juste donné le bâton pour se faire battre).
Et au contraire, j'ai été émerveillé par bien des passages du film (quand ils franchissent le trou de ver, qu'ils découvrent une nouvelle planète, et qu'on voit ce raz-de-marée gigantesque - qui est crédible scientifiquement, par-dessus le marché). De même, j'ai bien aimé la bande-son de Hans Zimmer.
Cet ambient qui constitue du sous-Philip Glass là ? Étalonné et mixé à la truelle avec, en prime, une partition dégueulasse ? Eh beh... En tout cas moi je ne peux pas blairer Zimmer et sa fameuse tonitruance.
Pour Sunshine je sais pas, je n'aime pas ce film : je me suis emmerdé devant et j'ai tellement tout oublié que je ne pourrai pas en parler.
Sinon pour Intestellar bah ses trucs scientifiques il les présente en se la pétant justement (c'est du Nolan après tout donc rien d'étonnant). C'est justement parce que ça ne sert nullement la mise en scène et que ça charge le scénario de trucs superflus que ça en fait un truc pompeux. Au contraire, ça n'est pas fait intelligemment : c'est mal branlé. J'ai rien contre l'aspect réaliste de certaines œuvres mais quand ça sert à rien je dis non. Encore une fois, je préfère un million de fois le jeu des grandeurs proposé par un Mission to Mars qui s'affranchissait pourtant de toute la partie décollage de la fusée (et je parle même pas de la fin tarabiscotée). Parce que ça symbolisait bien plus la grandeur d'un voyage spatial que ce qu'Intestellar faisait en mettant en place ce silence après le décollage. Et puis surtout parce que c'est du De Palma et que je le préfère à Nolan : De Palma a mille fois plus de talent que Nolan. Et 2001 était monté comme une fable métaphysique donc là c'était encore pire : je n'ai pas fait gaffe un seul instant au réalisme de l'oeuvre.
Sinon, pour la planète avec le raz-de-marée dans Interstellar, en fait il a juste repompé des plans de Solaris de Tarkovski. Et pour le trou de ver c'est plutôt à prendre du côté de chez Cameron avec Abyss.
Pas d'accord du tout, je le trouve "humble" au contraire, mais bon, on ne sera pas d'accord visiblement. ^^
Non, je suis désolé, pour moi tu es en train de dire une énormité, je ne peux pas te laisser dire ça, parce que j'estime que ce que tu dis est faux (peut-être par méconnaissance du sujet et de la physique) :
Bref, le film a été très réfléchi, il utilise pas mal d'éléments scientifiques au service du scénario et de la mise en scène, et sans que ce soit "prétentieux" ni "pompeux" (sinon, autant dire que n'importe quel film qui cherche à présenter des faits scientifiques "pèterait forcément plus haut que son cul", chose à laquelle je suis en désaccord total).
C'est ton droit. Moi aussi j'aime beaucoup le côté "fable métaphysique", mais j'aime aussi son "réalisme", ce qui lui donne quelque chose en plus, une qualité supplémentaire. De même, un autre spectateur a le droit de ne pas être intéressé par le réalisme historique mais de juste aimer un "film historique" pour son côté "évasion" (tandis que les "connaisseurs" apprécieront à la fois ce côté "émerveillement" ou "évasion", mais aussi son "réalisme historique").
Les deux dernières oeuvres cinématographiques que j'ai vu récemment sont :
The Dead Don't Die de Jim Jarmusch, sans même bien connaître le réalisateur, on devine facilement que c'est lui du moment que vous avez-vu Only Lovers Left Alive, les deux films sont issuent d'un même délire hipster sous sédatif, qui ne racontent rien mais qui offrent une ambiance intéressante.
The Dark Crystal : Age of Resistance, excellent ! Un côté nostalgique étant donné que j'avais la VHS du film à l'époque, c'est un vent de fraîcheur avec de la créativité et passé le 2ème épisode, on lâche plus. La Saison 2 n'a pas encore été totalement approuvé, et ne devrait pas sortir avant 2021-2022, comme la saison 3 de Mindhunter.
Le prochain sera Parasite de Bong Joon-ho.
Ah non mais c'est pas de la méconnaissance ni une énormité, j'ai juste eu le sentiment d'être surchargé d'informations inutiles qui faisaient passer Interstellar pour un truc pédant qui ne laissait nullement la place au suggestif. Ce qu'il dit est peut-être vrai, ça n'est pas le plus important pour moi. Mais je n'ai pas envie d'aller voir un exposé scientifique s'il n'y a rien derrière. Et Intestellar c'est ça : un truc (pseudo) naturaliste mais trop conceptuel pour son réalisateur, comme l'ont été Inception et TDKR encore une fois. Ce mec essaye d'instaurer une dimension "spielbergienne" à ses personnages mais il se foire avec le trop plein d'argumentations scientifiques. En boulimique de savoir, il oublie presque — oui "presque" car il y a pire, hein, je l'ai juste trouvé moyen, pas nul — de faire du cinéma : le plus important.
Et je vais te prouver que ce que je dis n'a rien à voir avec un quelconque mépris pour tout ce qui oserait offrir du réalisme à ne plus savoir quoi en faire. Moonwalk One : grand film un peu docu/expérimental qui est ultra réaliste scientifiquement (mille fois plus que ton Interstellar ; enfin en même temps c'est documenté par Aldrin et compagnie). Pourquoi là ça marche et pas dans Interstellar ? Bah parce que le réalisateur sait y faire et sait transcender son naturalisme pour faire bien plus que du naturalisme. Ainsi, le documentaire se change en cinéma. Et voilà le problème avec Interstellar : s'il est naturaliste (et encore une fois, j'émets quelques doutes bien que n'étant pas assez calé en physique pour le dire), il est alors juste naturaliste et pas grand chose de plus. Le plus drôle c'est que les seules fois où il s'est voulu contemplatif c'est quand il s'abstenait de toute logorrhée scientifique en empruntant des éléments à d'autres films parus avant lui.
Filmer le réalisme histoire de mettre en avant une portée réaliste/naturaliste et rien de bien plus bah... je zappe. Et ça a beau "servir" le scénario — là encore, j'en doute —, ça oublie de servir la mise en scène.
Sinon semaine prochaine j'irai peut-être voir le dernier Rambo, tiens, juste comme ça.
Bon, soit, c'est ton avis. ^^
Je trouve justement que le film Interstellar échappe au côté "exposé scientifique" et n'assomme pas le spectateurs d'explications (il ne tombe pas dans ce piège dont sont victimes d'autres films de SF), qu'il laisse de la place au suggestif, à l'émotion et à l'émerveillement, avec un vrai talent de mise en scène et de bons acteurs. C'est du vrai cinéma. Et même chose pour Inception qui m'a beaucoup marqué. J'estime que les films de Nolan font partie de ce qui s'est fait de mieux dans la décennie.