Le gothique a tendance à m'overdoser de stimuli visuels x)
C'est clair qu'il y en a vraiment partout, tu sais presque pas où poser les yeux XD
Dans le même genre, le baroque c'est pas toujours évident non plus.
Le roman, c'est vrai que c'est une autre ambiance même si on peut trouver des bâtiments assez dingues : l'abbaye de Cluny par exemple.
Après, je préfère le roman de l'extérieur et le gothique de l'intérieur. Pour le gothique, c'est d'ailleurs là que tout se passe.
Citation:
Exactement, je me régale à lire les sources écrites sur le quotidiens des châtelains, le contexte et le déroulé de la construction, comment se passait les sièges des châteaux, etc. Il y a beaucoup de clichés à briser en ce qui concerne les châteaux et plus globalement le Moyen Âge, et la vérité (en tous cas ce que l'on peut tirer des sources) est vraiment passionnante.
Par exemple, les châteaux imprenables ne sont pas forcément si imprenables que ça. C'est souvent une question de temps et de moyen quoi. De même, les souterrains et les oubliettes, c'est bien joli, mais on peut oublier.
C'est d'ailleurs dommage qu'on ait encore toute cette imagerie romantique sur le MA. Je dis ça alors que je suis dix-neuviémiste de formation XD
EDIT :
Sinon, pour l'anecdote, je peux dire que ça m'a fait un hésiter quand même. C'est juste que je me suis rappelé qu'à part les fouilles là-bas, je n'avais pas la fibre ni la patience pour gratter pendant 4 heures un carré de 50 cm sur 50 cm et d'être hyper content à chaque fois que je tomberais sur chaque mini morceau d'os. Et tu rajoutes à ça que je ne sais pas du tout dessiner ^^'
C'est clair qu'il y en a vraiment partout, tu sais presque pas où poser les yeux XD
Dans le même genre, le baroque c'est pas toujours évident non plus.
Exact, moins fan du baroque pour le coup, le côté "antiquisant" me parle moins.
Citation:
Le roman, c'est vrai que c'est une autre ambiance même si on peut trouver des bâtiments assez dingues : l'abbaye de Cluny par exemple.
L'un des plus superbes centres de l'art roman en effet. J'adore cette opposition d'idéologie stylistique qui a eut lieu entre Cluny justement et Cîteaux, les Clunisiens qui assument totalement la richesse de leur abbaye, et les Clunisiens qui jouent la fausse modestie x) Quel dommage que le bâtiment Cluny III n'ait pas survécu à la Révolution..
Citation:
Après, je préfère le roman de l'extérieur et le gothique de l'intérieur. Pour le gothique, c'est d'ailleurs là que tout se passe.
Les intérieurs du gothique rayonnant sont juste exceptionnels, toutes ces baies, ce travail du vitrail..
"[...] Tutu chapeau pointu !
C'était le petit Gavroche qui s'en allait en guerre."
C'est d'ailleurs dommage qu'on ait encore toute cette imagerie romantique sur le MA. Je dis ça alors que je suis dix-neuviémiste de formation XD
Le Moyen Âge a été l'objet de tous les fantasmes de toutes façons, autant dans la littérature que le cinéma, de la même manière que l'Antiquité, la Préhistoire, les Dinos, enfaite tout ce qui nous est étranger temporalement parlant. Mais bon, ça a donné des bons films et des bons bouquins xD
Citation:
je n'avais pas la fibre ni la patience pour gratter pendant 4 heures un carré de 50 cm sur 50 cm et d'être hyper content à chaque fois que je tomberais sur chaque mini morceau d'os. Et tu rajoutes à ça que je ne sais pas du tout dessiner ^^'
C'est si bien résumé ^^ C'est ce genre de paramètres qui m'a incité à ne pas suivre la voie de l'archéologie.
Disons que pour le baroque, c'est surtout que c'est beaucoup de pathos et d'excès. C'est assumé, je le sais bien mais ça reste de l'excès tout de même ^^
C'est parfois "un peu trop".
Pour Cluny, quand tu vois ce qui reste, tu peux imaginer la taille de ce que devait être l'abbaye. Mais oui, c'est dommage toutes ces destructions. M'enfin, il nous reste encore le charme des ruines.
Vraiment, le gothique, à l'intérieur avec toutes les couleurs, l'encens et l'orgue en même temps, ça a de quoi faire tourner la tête.
J'me souviens aussi d'un truc que j'avais appris et qui m'avait pas mal fait tripper : que les escaliers à l'intérieur d'un palais, c'était signe de richesse. En gros, il faut de la place pour faire un énorme escalier d'apparat (comme l'escalier des ambassadeurs à Versailles). En parlant de Versailles, c'était le palais à la mode pendant pas mal de temps. Il y a plein de copies de Versailles (en plus petit en général) un peu partout en Europe : du Portugal à la Russie, t'en as un peu partout. Et quand c'était pas le palais entier, c'était des parties du palais. Par exemple, l'escalier des ambassadeurs est reproduit à l'identique dans le palais d'Egmont (à Bruxelles). Et pour le détail, le marbre wallon qui a servi pour les escaliers à Versailles est le même que pour l'escalier du palais d'Egmont ^^
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Ah les fameux escaliers. Un sujet très intéressant. Le Château de Chambord en a sûrement le plus illustre représentant, ou presque. Sa position centrale dans le château en fait pour l'époque une exception, eux qui étaient habituellement en saillie, à l'extérieur ou dans une tourelle. Et puis bon, celui qui l'a conçu c'est pas le dernier des inconnus non plus ^^. Pour l'avoir vu en vrai, Chambord et son escalier sont vraiment impressionnants, tout comme le château de Chenonceau par ailleurs, que j'aimerai bien visiter aussi. Quant à Versailles, il me tarde d'y aller, je n'ai jamais eu cette chance !
"[...] Tutu chapeau pointu !
C'était le petit Gavroche qui s'en allait en guerre."
C'est un peu ça le problème avec l'architecture : il faut que tu te déplaces pour voir les bâtiments afin d'en avoir l'expérience la plus concrète. Ce n'est évidemment pas la même chose avec la littérature, la peinture ou encore la musique (même si les expériences peuvent être différentes pour chacun de ces arts évidemment).
Mais même sur place on ne peut pas se rendre compte de tout, on peut pas appréhender tout d'un coup. Reste les plans alors. C'est avec les plans que tu te rends compte par exemple que tout est pensé à Versailles autour du roi soleil. Quand il veut montrer qu'il est un chef de guerre, on le peint en Arès ; quand il se veut protecteur des arts, c'est Apollon. Et il y a des peintures et des sculptures de ce type partout dans Versailles et dans les jardins. Les chemins par exemple, sont tracés pour représenter des rayons de soleil qui irradient à partir de Versailles justement.
Petite anecdote, on surnomme Louis XIV, le roi soleil, à cause du rôle du soleil tenu par lui dans Le Ballet de la nuit.
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Alala, j'espère pouvoir aller le voir ce joyau de Versailles un de ces jours. Je vais emménager à Tours sous peu donc j'aurai l'opportunité d'y aller plus facilement que depuis mon ancien domicile (Grenoble loul). J'aimerais aussi revoir celui d'Amboise, j'y suis allé étant petit mais mes souvenirs sont obscurs.
Citation:
Petite anecdote, on surnomme Louis XIV, le roi soleil, à cause du rôle du soleil tenu par lui dans Le Ballet de la nuit.
Le Journal d'une femme de chambre d'Octave Mirbeau (1848-1917) met en scène une femme de chambre arrivant en province dans une nouvelle maison. À peine arrivée, madame donne le ton alors que monsieur, sous des dehors timides, la reluque d'une manière peu catholique, il faut bien le dire. Elle fera connaissance avec les domestiques des environs et entendra des histoires pas vraiment roses à propos de ses nouveaux employeurs... Venant de Paris, la campagne la change. Elle aura un peu de mal au début, regrettera même ses anciennes places, mais que voulez-vous ? quand on n'a pas la sous et peu d'éducation, il faut se contenter de ce que l'on peut trouver. Céslestin, la femme de chambre, rencontrera également Joseph, le jardinier cocher, antisémite et peut-être mêlé au viol ainsi qu'au meurtre horrible d'une fillette de la région. L'affaire sera classée sans suite mais Célestine gardera des doutes quant à son implication dans l'affaire.
On y verra de la crasse et du stupre aussi. C'est une occasion pour Mirbeau de dresser une sorte d'état moral de la bourgeoisie de son temps. Se mettre du côté des "petits" pour montrer la médiocrité des "grands". Le roman n'est pas forcément toujours complaisant avec ce petit monde mais j'ai quelques fois senti certaines facilités à montrer ainsi les travers des autres. Bien sûr, Mirbeau attaque sa propre classe dans le roman, et je dois bien dire que je n'éprouve pas beaucoup de sympathie pour la bourgeoisie en général. Mais, le fait de donner la parole à Célestine et d'en faire un personnage fort malgré ses quelques petits travers, m'a donné l'impression qu'elle était dans le bon camp, qu'il n'y avait pas de saleté dans son monde, dans sa classe si vous préférez. C'est oublier beaucoup de choses en vérité. Je ne pense pas qu'il existe de bonne ou de mauvaise classe. La nocivité peut être plus importante lorsqu'on a du pouvoir ou de l'argent mais tout le monde possède la faculté d'être médiocre, peu importe sa classe. L'attitude donc de se mettre du côté des "petits" pour se moquer des "grands" est une facilité selon moi et me gène parfois. Ce sentiment de gène s'est accentué à plusieurs reprises au cours de la lecture quand on se rend compte de la médiocrité des domestiques de la région. L'histoire du viol, par exemple, montre la capacité des gens, quelle que soit leur classe sociale, de montrer toute leur saleté et leur stupidité quand il s'agit de faire des "pronostiques" au sujet de cette affaire. La fin m'a fait relativiser aussi le côté "extraordinaire" de Célestine qui, malgré ses convictions à propos de la culpabilité de Joseph dans cette affreuse affaire, se mettre en couple avec lui et se laissera envahir par une sorte de côté démoniaque, je ne peux pas trouver d'autre explication à son changement si soudain dans le roman si ce n'est qu'elle se retrouve tout à fait sous l'emprise de ce jardinier criminel.
Le roman est néanmoins plaisant à lire. Ce n'est cependant pas le meilleur de l'écrivain dont Le jardin des supplices m'a laissé des traces plus profondes. Ceci dit, ce n'est pas difficile vu que cet ouvrage évoquait toutes sortes de tortures les plus infâmes possibles. L'histoire se lit donc même si je lui trouve une certaine redondance dans sa deuxième partie. Si l'histoire se tient assez bien dans sa première moitié, la narration change alors et le lecteur a plus l'impression de suivre une succession de petits récits centrés sur Célestine qui raconte beaucoup de ses souvenirs. Le roman se transforme alors en témoignage et perd un peu de sa force je trouve. Mais, si cela vous intéresse, lisez le car c'est tout de même un roman d'une certaine force tant littéraire que sociale.
Comme d'habitude, un petit extrait pour illustrer tout ça. C'est un petit souvenir de Célestine à propos d'un de ses précédents employeurs :
Citation:
Monsieur entra. Ah ! le drôle de bonhomme, et qu'il m'amusa !... Figurez-vous un petit vieux, tiré à quatre épingles, rasé de frais et tout rose, ainsi qu'une poupée. Très droit, très vif, très ragoûtant, ma foi ! il sautillait, en marchant, comme une petite sauterelle dans les prairies. Il me salua et avec infiniment de politesse :
– Comment vous appelez-vous, mon enfant ?
– Célestine, Monsieur.
– Célestine... fit-il... Célestine ?... Diable !... Joli nom, je ne prétends pas le contraire... mais trop long, mon enfant, beaucoup trop long... Je vous appellerai Marie, si vous le voulez bien... C'est très gentil aussi, et c'est court... Et puis, toutes mes femmes de chambre, je les ai appelées Marie. C'est une habitude à laquelle je serais désolé de renoncer... Je préférerais renoncer à la personne.
Ils ont tous cette bizarre manie de ne jamais vous appeler par votre nom véritable... Je ne m'étonnai pas trop, moi à qui l'on a donné déjà tous les noms de toutes les saintes du calendrier... Il insista :
– Ainsi, cela ne vous déplaît pas que je vous appelle Marie ?... c'est bien entendu ?...
– Mais oui, Monsieur...
– Jolie fille... bon caractère... Bien, bien !
Il m'avait dit tout cela d'un air enjoué, extrêmement respectueux, et sans me dévisager, sans fouiller d'un regard déshabiller mon corsage, mes jupes, comme font, en général, les hommes. A peine s'il m'avait regardée. Depuis le moment où il était entré dans le salon, ses yeux restaient obstinément fixés sur mes bottines.
– Vous en avez d'autres ?... me demanda-t-il, après un court silence, pensant lequel il me sembla que son regard était devenu étrangement brillant.
– D'autres noms, Monsieur ?
– Non, mon enfant, d'autres bottines...
Et il passa, sur ses lèvres, à petits coups, une langue effilée, à la manière des chattes.
Je ne répondis pas tout de suite. Ce mot de bottines, qui me rappelait l'expression de gouaille polissonne du cocher, m'avait interdite. Cela avait donc un sens ?... Sur une interrogation plus pressante, je finis par répondre, mais d'une voix un peu rauque et troublée, comme s'il se fût agi de confesser un péché galant :
– Oui, Monsieur, j'en ai d'autres...
– Des vernies ?
– Oui, Monsieur.
– De très... très vernies ?
– Mais oui, Monsieur.
– Bien... bien... Et en cuir jaune ?
– Je n'en ai pas, Monsieur...
– Il faudra en avoir... Je vous en donnerai.
– Merci, Monsieur !
– Bien... bien... Tais-toi !
J'avais peur, car il venait de passer dans ses yeux des lueurs troubles... des nuées rouges de spasme... Et des gouttes de sueur roulaient sur son front... Croyant qu'il allait défaillir, je fus sur le point de crier, d'appeler au secours... mais la crise se calma, et, au bout de quelques minutes, il reprit d'une voix apaisée, tandis qu'un peu de salive moussait encore au coin de ses lèvres :
– Ça n'est rien... c'est fini... Comprenez-moi, mon enfant... Je suis un peu maniaque... A mon âge, cela est permis, n'est-ce pas ?... Ainsi, tenez, par exemple je ne trouve pas convenable qu'une femme cire ses bottines, à plus forte raison les miennes... Je respecte beaucoup les femmes, Marie, et ne peux souffrir cela... C'est moi qui nierai vos bottines, vos petites bottines, vos chères petites bottines... C'est moi qui les entretiendrai... Ecoutez bien... Chaque soir, avant de vous coucher, vous porterez vos bottines dans ma chambre... vous les placerez près du lit, sur une petite table, et, tous les matins, en venant ouvrir mes fenêtres... vous les reprendrez.
– Et, comme je manifestais un prodigieux étonnement, il ajouta :
– Voyons !... Ça n'est pas énorme, ce que je vous demande là... c'est une chose très naturelle, après tout... Et si vous êtes bien gentille...
Vivement, il tira de sa poche deux louis qu'il me remit.
– Si vous êtes bien gentille, bien obéissante, je vous donnerai souvent des petits cadeaux. La gouvernante vous paiera, tous les mois, vos gages... Mais, moi, Marie, entre nous, souvent, je vous donnerai des petits cadeaux. Et qu'est-ce que je vous demande ?... Voyons, ça n'est rien d'extraordinaire, là... Est-ce donc si extraordinaire, mon Dieu ?
Monsieur s'emballait encore. A mesure qu'il parlait, ses paupières battaient, battaient comme des feuilles sous l'orage.
– Pourquoi ne dis-tu rien, Marie ?... Dis quelque chose... Pourquoi ne marches-tu pas ? Marche un peu que je les vois remuer... que je les voies vivre... tes petites bottines.
Il s'agenouilla, baissa mes bottines, les pétrit de ses doigts fébriles et caresseurs, les délaça...Et, en les baisant, les pétrissant, les caressant, il disait d'une voix suppliante, d'une voix d'enfant qui pleure :
– Oh ! Marie... Marie... tes petites bottines... donne-les-moi, tout de suite... tout de suite... tout de suite... je les veux tout de suite... donne-le-moi...
J'étais sans force... La stupéfaction me paralysait... Je ne savais plus si je vivais réellement ou si je rêvais... Des yeux de Monsieur, je ne voyais que deux petits globes blancs, striés de rouge. Et sa bouche était tout entière barbouillée d'une sorte de bave savonneuse...
Enfin, il emporta mes bottines et, durant deux heures, il s'enferma avec elles dans sa chambre...
– Vous plaisez beaucoup à Monsieur, me dit la gouvernante en me montrant la maison... tâchez que cela continue... La place est bonne...
Quatre jours après, le matin, à l'heure habituelle, en allant ouvrir les fenêtres, je faillis m'évanouir d'horreur, dans la chambre... Monsieur était mort !... Etendu sur le dos, au milieu de son lit, le corps presque entièrement nu, on sait déjà en lui et sur lui la rigidité du cadavre. Il ne s'était point débattu. Sur les couvertures, nul désordre ; sur le drap, pas la moindre trace de lutte, de soubresaut, d'agonie, de mains crispées qui cherchent à étrangler la Mort... Et j'aurais cru qu'il dormait, si son visage n'eût été violet, violet affreusement, de ce violet sinistre qu'ont les aubergines. Spectacle terrifiant, qui, plus encore que le visage, me secoua d'épouvante... Monsieur tenait, serrée dans ses dents, une de mes bottines, si durement serrée dans ses dents, qu'après d'inutiles et horribles efforts je fus obligée d'en couper le cuir, avec un rasoir, pour la leur arracher...
Je ne suis pas une sainte... j'ai connu bien des hommes et je sais, par expérience, toutes les folies, toutes les saletés dont ils sont capables... Mais un homme comme Monsieur ? Ah ! vrai !... Est-ce rigolo, tout de même, qu'il existe des types comme ça ?... Et où vont-ils chercher toutes leurs imaginations, quand c'est si simple, quand c'est si bon de s'aimer gentiment... comme tout le monde...
Bonne lecture !
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Les Années d'apprentissage de Wilhelm Meister de Johann Wolfgang von Goethe (1749-1832) est ce qu'on appelle un roman de formation (ou d'apprentissage). J'aime particulièrement ce type de romans et je les pense fondateurs dans le passage de la vie d'enfant à la vie d'adulte. C'est une manière de suivre le héros dans son apprentissage de la vie, apprentissage que nous devons ou avons du faire lorsque nous étions plus jeunes. Ainsi, le personnage découvrira l'amour, la joie, l'amitié mais aussi, et surtout, la désillusion de ce que peut être la vie. Il y a donc une touche d'amertume que dégoûte avec d'autant plus de plaisir que je la pense totalement fondée.
Mais nous ne sommes pas ici devant n'importe quel roman de formation, nous sommes devant le premier du genre. Wilhelm se sent déborder d'amour et de passion : l'amour pour une femme ; la passion pour le théâtre dont il se croit suffisamment talentueux pour exercer le difficile métier d'acteur. Le roman se poursuit tranquillement en menant notre jeune héros à devoir déjouer les différents pièges tendus par la vie : brigands, jalousie, femmes, indifférence, société, réalité... le chemin sera semé d'embûche et dur sera l'apprentissage. Le roman n'est pas une simple histoire Goethe développe, à plusieurs reprises, certaines conceptions sur le théâtre en général et sur Shakespeare en particulier.
Ai-je aimé le roman ? Je ne sais comment trop répondre. Si je ne peux pas être dans l'affirmative, je me dois de rester honnête et ne pas répondre non plus par la négative. J'ai aimé les conceptions artistiques de Goethe, et si je ne les partage pas forcément à chaque fois, elles sont assez solides pour être défendues bien entendu. C'est donc un vrai régal de suivre les réflexions de l'écrivain. J'ai également beaucoup aimé les scènes où "l'histoire avance" comme on dit, c'est-à-dire les scènes durant lesquelles un élément survient comme point pivot pour permettre de reprendre la route.
Par contre, j'ai eu un peu plus de mal sur les conceptions sociales de Goethe. Je ne sais pas comment dire... ce n'est pas qu'elles soient dépassées, c'est juste que cela m'ennuie très fort. De même, les dialogues organisés dans de petits groupes statiques comme autant de moyens de commenter les événements qui sont arrivés au héros m'ont laissé de marbre. C'est assez dommage car j'ai trouvé ces passages, qui sont tout de même assez nombreux, d'un ennui royal...
Je ne sais pas si je conseille le roman car il n'est pas forcément d'une lecture aisée même si ce n'est pas le livre le plus dur que j'ai lu. C'est surtout les réflexions artistiques qui parsèment le roman qui peuvent faire que ce n'est pas facile à lire. Si vous aimez le genre, allez-y, sinon passez votre chemin.
Comme d'habitude, un petit extrait qui, chose rare, me touche personnellement :
Citation:
Félix avait couru au jardin, Wilhelm le suivit avec ravissement. Le plus beau matin du monde revêtait toute chose d'un attrait nouveau, et Wilhelm vivait un moment de pleine sérénité. Dans la liberté et la magnificence de cet univers, Félix était encore tout neuf, et son père n'en savait guère plus long que lui sur les objets à propos desquels l'enfant ne se lassait pas de lui poser des questions. Ils finirent par engager la conversation avec le jardinier qui leur énuméra les noms et les usages d'une quantité de plantes ; Wilhelm voyait la nature par l'organe d'un sens nouveau, et la curiosité, le besoin de savoir qu'il découvrait chez l'enfant, lui faisaient éprouver quel pauvre intérêt il avait pris jusque-là aux choses extérieures à lui-même, combien ses connaissances et son savoir étaient bornés. C'est en ce jour, le plus heureux de sa vie, que commençait seulement, lui semblait-il, sa propre formation ; il sentait la nécessité de s'instruire puisqu'il allait être obligé d'enseigner.
Jarno et l'abbé ne s'étaient pas encore montrés ; ils reparurent, accompagnés d'un étranger. Wilhelm, tout surpris, courant au-devant de lui ; il n'en croyait pas ses yeux. C'était Werner, qui hésita aussi un instant de le reconnaître. Ils s'embrassèrent tendrement et ne purent ni l'un nu l'autre cacher à quel point ils se trouvaient mutuellement changés. Werner affirmait que son ami était plus grand, plus fort, plus droit, qu'il avait une meilleure tournure et des manières plus aimables. ”Je regrette un peu son ancienne ingénuité, ajouta-t-il. – Elle reparaîtra, dit Wilhelm, quand nous serons revenus de notre première surprise."
Il s'en fallut de beaucoup que Werner eût fait sur Wilhelm une impression aussi favorable. Le brave garçon semblait avoir régressé plus que progressé. Il était beaucoup plus maigre qu'autrefois, son visage anguleux s'était amenuisé, le nez paraissait plus long, le front et le crâne s'étaient dégarnis, sa voix claire, dure, criarde, sa poitrine creuse, ses épaules voûtées, ses joues décolorées ne laissaient aucun doute sur la nature hypocondriaque de ce travailleur acharné.
Bonne lecture !
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Narcisse et Goldmund de l'écrivain allemand Hermann Hesse (1877-1962) est un roman que je conseille tout particulièrement à tous ceux qui sont désenchantés par le monde !
Hesse situe son histoire dans l'Allemagne du Moyen Âge. Le jeune enfant Goldmund est conduit dans un monastère par son père souhaitant s'en débarrasser. Le petit ne connaît pas sa mère qui restera un élément essentiel dans tout le roman et dans toute la vie de ce Goldmund. Arrivé au monastère, il fera la rencontre de Narcisse, jeune moine enseignant archi-doué. Les deux compères sentiront grandir l'un pour l'autre une affection commune. Et Narcisse, son professeur, deviendra son ami. C'est bien l'histoire d'une amitié que Hesse nous raconte ici. Une amitié vraie, sans tache, sans intérêt ; une amitié pure comme il en existe que trop peu.
Si Narcisse est l'archétype du savant, Goldmund se tournera vers l'art. Tous deux très différents, ils seront cependant présentés comme complémentaires pour comprendre le mystère de la vie et de l'existence humaine. Narcisse est un moine savant tourné vers Dieu et les sphères intellectuelles ; Goldmund est un artiste – il sera sculpteur – et se nourrira de toutes les nourritures des sens. Il voyagera, il rencontrera des femmes, beaucoup, et ne s'installera pour ainsi dire jamais très longtemps dans un endroit. Il connaîtra le froid, la peur, la tristesse, la colère et la culpabilité. Mais loin de le détruire, sa vie lui sera un moyen pour nourrir son art. La destruction ne viendra que plus tard, après avoir retrouvé son cher Narcisse qu'il lui avait fallu quitter pour vivre son aventure.
Le roman est rempli de moments poignants et très vrais. Les descriptions sont souvent magnifiques et très précises. Enfin, le lecteur se retrouve face à une alternance de joies, de peines et de moments terrifiants. J'ai été bluffé par ce roman qui laissera une belle trace, je dois bien le dire.
Un tout petit extrait qui m'a particulièrement touché :
Citation:
– Il se peut, dit Narcisse, et aucun de nous deux n'est capable en cela de comprendre tout à fait l'autre. Mais il y a une chose commune à tous les hommes de bonne volonté. C'est que toutes nos œuvres, en fin de compte, nous font honte, qu'il nous faut toujours recommencer par le commencement et que le sacrifice doit toujours se renouveler.
C'est clair qu'il y en a vraiment partout, tu sais presque pas où poser les yeux XD
Dans le même genre, le baroque c'est pas toujours évident non plus.
Le roman, c'est vrai que c'est une autre ambiance même si on peut trouver des bâtiments assez dingues : l'abbaye de Cluny par exemple.
Après, je préfère le roman de l'extérieur et le gothique de l'intérieur. Pour le gothique, c'est d'ailleurs là que tout se passe.
Par exemple, les châteaux imprenables ne sont pas forcément si imprenables que ça. C'est souvent une question de temps et de moyen quoi. De même, les souterrains et les oubliettes, c'est bien joli, mais on peut oublier.
C'est d'ailleurs dommage qu'on ait encore toute cette imagerie romantique sur le MA. Je dis ça alors que je suis dix-neuviémiste de formation XD
EDIT :
Sinon, pour l'anecdote, je peux dire que ça m'a fait un hésiter quand même. C'est juste que je me suis rappelé qu'à part les fouilles là-bas, je n'avais pas la fibre ni la patience pour gratter pendant 4 heures un carré de 50 cm sur 50 cm et d'être hyper content à chaque fois que je tomberais sur chaque mini morceau d'os. Et tu rajoutes à ça que je ne sais pas du tout dessiner ^^'
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Exact, moins fan du baroque pour le coup, le côté "antiquisant" me parle moins.
L'un des plus superbes centres de l'art roman en effet. J'adore cette opposition d'idéologie stylistique qui a eut lieu entre Cluny justement et Cîteaux, les Clunisiens qui assument totalement la richesse de leur abbaye, et les Clunisiens qui jouent la fausse modestie x) Quel dommage que le bâtiment Cluny III n'ait pas survécu à la Révolution..
Les intérieurs du gothique rayonnant sont juste exceptionnels, toutes ces baies, ce travail du vitrail..
"[...] Tutu chapeau pointu !
C'était le petit Gavroche qui s'en allait en guerre."
Le Moyen Âge a été l'objet de tous les fantasmes de toutes façons, autant dans la littérature que le cinéma, de la même manière que l'Antiquité, la Préhistoire, les Dinos, enfaite tout ce qui nous est étranger temporalement parlant. Mais bon, ça a donné des bons films et des bons bouquins xD
C'est si bien résumé ^^ C'est ce genre de paramètres qui m'a incité à ne pas suivre la voie de l'archéologie.
EDIT : Merde foirage pour le double post, sorry
"[...] Tutu chapeau pointu !
C'était le petit Gavroche qui s'en allait en guerre."
Disons que pour le baroque, c'est surtout que c'est beaucoup de pathos et d'excès. C'est assumé, je le sais bien mais ça reste de l'excès tout de même ^^
C'est parfois "un peu trop".
Pour Cluny, quand tu vois ce qui reste, tu peux imaginer la taille de ce que devait être l'abbaye. Mais oui, c'est dommage toutes ces destructions. M'enfin, il nous reste encore le charme des ruines.
Vraiment, le gothique, à l'intérieur avec toutes les couleurs, l'encens et l'orgue en même temps, ça a de quoi faire tourner la tête.
J'me souviens aussi d'un truc que j'avais appris et qui m'avait pas mal fait tripper : que les escaliers à l'intérieur d'un palais, c'était signe de richesse. En gros, il faut de la place pour faire un énorme escalier d'apparat (comme l'escalier des ambassadeurs à Versailles). En parlant de Versailles, c'était le palais à la mode pendant pas mal de temps. Il y a plein de copies de Versailles (en plus petit en général) un peu partout en Europe : du Portugal à la Russie, t'en as un peu partout. Et quand c'était pas le palais entier, c'était des parties du palais. Par exemple, l'escalier des ambassadeurs est reproduit à l'identique dans le palais d'Egmont (à Bruxelles). Et pour le détail, le marbre wallon qui a servi pour les escaliers à Versailles est le même que pour l'escalier du palais d'Egmont ^^
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Ah les fameux escaliers. Un sujet très intéressant. Le Château de Chambord en a sûrement le plus illustre représentant, ou presque. Sa position centrale dans le château en fait pour l'époque une exception, eux qui étaient habituellement en saillie, à l'extérieur ou dans une tourelle. Et puis bon, celui qui l'a conçu c'est pas le dernier des inconnus non plus ^^. Pour l'avoir vu en vrai, Chambord et son escalier sont vraiment impressionnants, tout comme le château de Chenonceau par ailleurs, que j'aimerai bien visiter aussi. Quant à Versailles, il me tarde d'y aller, je n'ai jamais eu cette chance !
"[...] Tutu chapeau pointu !
C'était le petit Gavroche qui s'en allait en guerre."
C'est un peu ça le problème avec l'architecture : il faut que tu te déplaces pour voir les bâtiments afin d'en avoir l'expérience la plus concrète. Ce n'est évidemment pas la même chose avec la littérature, la peinture ou encore la musique (même si les expériences peuvent être différentes pour chacun de ces arts évidemment).
Mais même sur place on ne peut pas se rendre compte de tout, on peut pas appréhender tout d'un coup. Reste les plans alors. C'est avec les plans que tu te rends compte par exemple que tout est pensé à Versailles autour du roi soleil. Quand il veut montrer qu'il est un chef de guerre, on le peint en Arès ; quand il se veut protecteur des arts, c'est Apollon. Et il y a des peintures et des sculptures de ce type partout dans Versailles et dans les jardins. Les chemins par exemple, sont tracés pour représenter des rayons de soleil qui irradient à partir de Versailles justement.
Petite anecdote, on surnomme Louis XIV, le roi soleil, à cause du rôle du soleil tenu par lui dans Le Ballet de la nuit.
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Alala, j'espère pouvoir aller le voir ce joyau de Versailles un de ces jours. Je vais emménager à Tours sous peu donc j'aurai l'opportunité d'y aller plus facilement que depuis mon ancien domicile (Grenoble loul). J'aimerais aussi revoir celui d'Amboise, j'y suis allé étant petit mais mes souvenirs sont obscurs.
Ah ça tu vois je ne savais pas. Marrant.
"[...] Tutu chapeau pointu !
C'était le petit Gavroche qui s'en allait en guerre."
Le Journal d'une femme de chambre d'Octave Mirbeau (1848-1917) met en scène une femme de chambre arrivant en province dans une nouvelle maison. À peine arrivée, madame donne le ton alors que monsieur, sous des dehors timides, la reluque d'une manière peu catholique, il faut bien le dire. Elle fera connaissance avec les domestiques des environs et entendra des histoires pas vraiment roses à propos de ses nouveaux employeurs... Venant de Paris, la campagne la change. Elle aura un peu de mal au début, regrettera même ses anciennes places, mais que voulez-vous ? quand on n'a pas la sous et peu d'éducation, il faut se contenter de ce que l'on peut trouver. Céslestin, la femme de chambre, rencontrera également Joseph, le jardinier cocher, antisémite et peut-être mêlé au viol ainsi qu'au meurtre horrible d'une fillette de la région. L'affaire sera classée sans suite mais Célestine gardera des doutes quant à son implication dans l'affaire.
On y verra de la crasse et du stupre aussi. C'est une occasion pour Mirbeau de dresser une sorte d'état moral de la bourgeoisie de son temps. Se mettre du côté des "petits" pour montrer la médiocrité des "grands". Le roman n'est pas forcément toujours complaisant avec ce petit monde mais j'ai quelques fois senti certaines facilités à montrer ainsi les travers des autres. Bien sûr, Mirbeau attaque sa propre classe dans le roman, et je dois bien dire que je n'éprouve pas beaucoup de sympathie pour la bourgeoisie en général. Mais, le fait de donner la parole à Célestine et d'en faire un personnage fort malgré ses quelques petits travers, m'a donné l'impression qu'elle était dans le bon camp, qu'il n'y avait pas de saleté dans son monde, dans sa classe si vous préférez. C'est oublier beaucoup de choses en vérité. Je ne pense pas qu'il existe de bonne ou de mauvaise classe. La nocivité peut être plus importante lorsqu'on a du pouvoir ou de l'argent mais tout le monde possède la faculté d'être médiocre, peu importe sa classe. L'attitude donc de se mettre du côté des "petits" pour se moquer des "grands" est une facilité selon moi et me gène parfois. Ce sentiment de gène s'est accentué à plusieurs reprises au cours de la lecture quand on se rend compte de la médiocrité des domestiques de la région. L'histoire du viol, par exemple, montre la capacité des gens, quelle que soit leur classe sociale, de montrer toute leur saleté et leur stupidité quand il s'agit de faire des "pronostiques" au sujet de cette affaire. La fin m'a fait relativiser aussi le côté "extraordinaire" de Célestine qui, malgré ses convictions à propos de la culpabilité de Joseph dans cette affreuse affaire, se mettre en couple avec lui et se laissera envahir par une sorte de côté démoniaque, je ne peux pas trouver d'autre explication à son changement si soudain dans le roman si ce n'est qu'elle se retrouve tout à fait sous l'emprise de ce jardinier criminel.
Le roman est néanmoins plaisant à lire. Ce n'est cependant pas le meilleur de l'écrivain dont Le jardin des supplices m'a laissé des traces plus profondes. Ceci dit, ce n'est pas difficile vu que cet ouvrage évoquait toutes sortes de tortures les plus infâmes possibles. L'histoire se lit donc même si je lui trouve une certaine redondance dans sa deuxième partie. Si l'histoire se tient assez bien dans sa première moitié, la narration change alors et le lecteur a plus l'impression de suivre une succession de petits récits centrés sur Célestine qui raconte beaucoup de ses souvenirs. Le roman se transforme alors en témoignage et perd un peu de sa force je trouve. Mais, si cela vous intéresse, lisez le car c'est tout de même un roman d'une certaine force tant littéraire que sociale.
Comme d'habitude, un petit extrait pour illustrer tout ça. C'est un petit souvenir de Célestine à propos d'un de ses précédents employeurs :
Bonne lecture !
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Les Années d'apprentissage de Wilhelm Meister de Johann Wolfgang von Goethe (1749-1832) est ce qu'on appelle un roman de formation (ou d'apprentissage). J'aime particulièrement ce type de romans et je les pense fondateurs dans le passage de la vie d'enfant à la vie d'adulte. C'est une manière de suivre le héros dans son apprentissage de la vie, apprentissage que nous devons ou avons du faire lorsque nous étions plus jeunes. Ainsi, le personnage découvrira l'amour, la joie, l'amitié mais aussi, et surtout, la désillusion de ce que peut être la vie. Il y a donc une touche d'amertume que dégoûte avec d'autant plus de plaisir que je la pense totalement fondée.
Mais nous ne sommes pas ici devant n'importe quel roman de formation, nous sommes devant le premier du genre. Wilhelm se sent déborder d'amour et de passion : l'amour pour une femme ; la passion pour le théâtre dont il se croit suffisamment talentueux pour exercer le difficile métier d'acteur. Le roman se poursuit tranquillement en menant notre jeune héros à devoir déjouer les différents pièges tendus par la vie : brigands, jalousie, femmes, indifférence, société, réalité... le chemin sera semé d'embûche et dur sera l'apprentissage. Le roman n'est pas une simple histoire Goethe développe, à plusieurs reprises, certaines conceptions sur le théâtre en général et sur Shakespeare en particulier.
Ai-je aimé le roman ? Je ne sais comment trop répondre. Si je ne peux pas être dans l'affirmative, je me dois de rester honnête et ne pas répondre non plus par la négative. J'ai aimé les conceptions artistiques de Goethe, et si je ne les partage pas forcément à chaque fois, elles sont assez solides pour être défendues bien entendu. C'est donc un vrai régal de suivre les réflexions de l'écrivain. J'ai également beaucoup aimé les scènes où "l'histoire avance" comme on dit, c'est-à-dire les scènes durant lesquelles un élément survient comme point pivot pour permettre de reprendre la route.
Par contre, j'ai eu un peu plus de mal sur les conceptions sociales de Goethe. Je ne sais pas comment dire... ce n'est pas qu'elles soient dépassées, c'est juste que cela m'ennuie très fort. De même, les dialogues organisés dans de petits groupes statiques comme autant de moyens de commenter les événements qui sont arrivés au héros m'ont laissé de marbre. C'est assez dommage car j'ai trouvé ces passages, qui sont tout de même assez nombreux, d'un ennui royal...
Je ne sais pas si je conseille le roman car il n'est pas forcément d'une lecture aisée même si ce n'est pas le livre le plus dur que j'ai lu. C'est surtout les réflexions artistiques qui parsèment le roman qui peuvent faire que ce n'est pas facile à lire. Si vous aimez le genre, allez-y, sinon passez votre chemin.
Comme d'habitude, un petit extrait qui, chose rare, me touche personnellement :
Bonne lecture !
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Narcisse et Goldmund de l'écrivain allemand Hermann Hesse (1877-1962) est un roman que je conseille tout particulièrement à tous ceux qui sont désenchantés par le monde !
Hesse situe son histoire dans l'Allemagne du Moyen Âge. Le jeune enfant Goldmund est conduit dans un monastère par son père souhaitant s'en débarrasser. Le petit ne connaît pas sa mère qui restera un élément essentiel dans tout le roman et dans toute la vie de ce Goldmund. Arrivé au monastère, il fera la rencontre de Narcisse, jeune moine enseignant archi-doué. Les deux compères sentiront grandir l'un pour l'autre une affection commune. Et Narcisse, son professeur, deviendra son ami. C'est bien l'histoire d'une amitié que Hesse nous raconte ici. Une amitié vraie, sans tache, sans intérêt ; une amitié pure comme il en existe que trop peu.
Si Narcisse est l'archétype du savant, Goldmund se tournera vers l'art. Tous deux très différents, ils seront cependant présentés comme complémentaires pour comprendre le mystère de la vie et de l'existence humaine. Narcisse est un moine savant tourné vers Dieu et les sphères intellectuelles ; Goldmund est un artiste – il sera sculpteur – et se nourrira de toutes les nourritures des sens. Il voyagera, il rencontrera des femmes, beaucoup, et ne s'installera pour ainsi dire jamais très longtemps dans un endroit. Il connaîtra le froid, la peur, la tristesse, la colère et la culpabilité. Mais loin de le détruire, sa vie lui sera un moyen pour nourrir son art. La destruction ne viendra que plus tard, après avoir retrouvé son cher Narcisse qu'il lui avait fallu quitter pour vivre son aventure.
Le roman est rempli de moments poignants et très vrais. Les descriptions sont souvent magnifiques et très précises. Enfin, le lecteur se retrouve face à une alternance de joies, de peines et de moments terrifiants. J'ai été bluffé par ce roman qui laissera une belle trace, je dois bien le dire.
Un tout petit extrait qui m'a particulièrement touché :
Bonne lecture !
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)