L'Igloo [topic de blabla]

Non non, Chuck. Excepté quand je lis, parmi la foule des coléreux, un égaré proférer des inepties sur un ton suffisant. Je ne peux alors m’empêcher de songer à Garance, dans Les Enfants du Paradis, répondant à Montray, qui lui demande qu’on l’aime : « Être aimé, mon ami ? Mais alors, les pauvres, qu’est-ce qui leur restera aux pauvres ? »

La classe ouvrière, j’en sors. L’humiliation d’être un enfant de pauvres dans une école de riches (car ma mère faisait, en plus, des ménages pour nous envoyer dans le privé), je l’ai éprouvée chaque jour de ma scolarité. Au retour des vacances de février, elle nous badigeonnait de fond de teint pour faire croire aux autres que nous revenions comme eux des sports d’hiver ‒ oui, elle était folle de faire ça. En classe, je restais muet, j’avais mal aux mots, je n’ai jamais su parler. Puis vers douze ans, j’ai découvert Jean Giraudoux. J’ai lu tout son théâtre car ses romans, à part Suzanne et le Pacifique, ils étaient trop difficiles pour moi. Je me souviens de la remarque de mon professeur de français à qui j’en avais fait la confidence : « Comment, vous ? Vous lisez Giraudoux ? », avec des sourcils froncés et une mauvaise haleine. Sa remarque avait causé en moi une confusion visible. J’étais devenu tout rouge. Pourquoi pas moi ? Fils du peuple, que me fallait-il lire ? Zola ? Le Club des Cinq ? Mickey Parade ?

La vérité, c’est que de la pauvreté, on ne peut rien dire. Elle laisse sans voix comme je le fus ce jour-là. Il faut arriver à passer outre, faire comme si ça n’avait pas eu lieu. Oublier les grosses chaussures qui blessent les pieds, les ricanements, les bravades, les dispensaires où poireautent des pauvres plus pauvres encore de ne pas savoir dire ce qui les afflige.

Le mieux c'est de faire comme Helli, Plop, Nico, Umbasa et Kylor. Grâce à eux la discussion ne cesse de voltiger en cotillons et confettis. On se croirait à Venise en plein carnaval. Cela donne envie de rire, de s'amuser ! :-)