Ah oui merci. Je l'avais déjà noté celui-là mais je ne l'ai pas encore acheté. M'enfin, je sais qu'il fait partie de ses chefs-d'œuvre donc je n'y couperai pas ^^
Mais je dois dire que j'ai été agréablement surpris par le style de Kessel. Je ne m'attendais pas du tout à ce que ce soit si écrit. Comme quoi, on a toujours des surprises en littérature =)
Pour les deux autres auteurs que tu cites, je dois bien avouer que je ne les connais pas. Dans le même genre — au sens large, parce que je ne le connais vraiment pas — j'ai dans ma pile Toni Morrison que je dois lire un jour où l'autre. J'attends le bon moment comme on dit. Mais merci pour les noms, je regarderai ça de plus près ;-)
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
J'ai fini il n'y a pas longtemps Tess d'Urberville de Thomas Hardy (1840-1928).
C'est l'histoire des malheurs d'une jeune fille, voilà comment résumer le propos du bouquin.
Suite aux demandes de ses parents, Tess s'en va dans une famille bourgeoise de la région avec qui ils auraient des liens de parentés. Bien que portant plus ou moins le même patronyme, ils ne sont pourtant pas de la même lignée. Les bourgeois, en effet, ont abusé du nom et pour se donner de la contenance, se sont inventés une histoire en usurpant le nom d'une ancienne famille de nobles dont la lignée s'est éteinte ou plutôt "corrompue" au fil du temps. C'est là que commencent les malheurs de la pauvre Tess.
Il faut dire qu'elle est très belle et qu'elle attire l'œil la donzelle. En arrivant chez ses "cousins" — entendez les usurpateurs — elle rencontre celui qui sera la cause de tous ses chagrins : Alec d'Urberville. La jeune fille est successivement séduite, trompée et abandonnée à son sort. Elle mettra un enfant au monde ; enfant qui ne survivra pas longtemps. Mais si l'enfant passera à trépas, il en sera autrement pour la faute qu'il symbolisait. Tess est coupable d'une faute irrémissible dans cette société anglaise puritaine de la fin du XIXe siècle. Elle fera la rencontre d'un autre homme, Angel Clare qui tombera amoureux d'elle et se fera à son tour aimé d'elle. Ils se rapprocheront au fur et à mesure du temps passé ensemble jusqu'à un événement particulier qui changera complètement la donne. L'histoire ne se termine pas très bien, comme vous pouvez déjà vous en douter.
Voilà pour l'intrigue principale. Ai-je aimé cette lecture ? Pour parler vrai, pas vraiment. Je peux même dire que je ne l'ai pas aimée du tout. Le livre est-il mauvais ? Je ne pense pas. Thomas Hardy est un vrai écrivain qui parvient à rendre l'atmosphère juste, les descriptions attrayantes et le rythme soutenu. Même si je l'ai lu en traduction, j'ai pu sentir qu'il avait une vraie personnalité littéraire, ce qui n'est pas rien. L'histoire en elle-même ? Je ne pense pas qu'elle pause problème. Elle marche, comme on dit. Bien sûr, quelques scènes pourraient être retravaillées mais il est possible de retravailler n'importe qu'elle œuvre au fond et cela importe peu. Non, ce qui m'a particulièrement embêté, ce sont les personnages eux-mêmes.
Comment expliquer la chose... ils donnent l'impression d'être vides. Ils ne sont que des victimes qui passent leur temps à subir des événements qui, la plupart du temps, sont infligées par eux-mêmes. Ils souffrent, la chose est claire, mais leur souffrance émane bien souvent d'eux-mêmes. Ils me font penser à ces gens qui, sous prétexte qu'ils sont obèses, voient de la grossophobie partout. Je ne dis pas que la grossophobie n'existe pas bien entendu mais certains témoignages entendus sont parfois discutables. Par exemple, lorsque j'entends une personne dire qu'elle fut victime de grossophobie à la boulangerie parce qu'une personne entendant qu'elle avait commandé deux croissant a osé dire : "pour moi, un seul suffira", je trouve qu'il est difficile de pouvoir affirmer que c'est un acte grossophobe. Ce n'est pas l'objet du livre mais l'exemple montre bien ce que je veux expliquer : il arrive que les torts que nous pensons subir soient en fait infligés par nous-mêmes.
Bien sûr que la pauvre Tess est jugée par la communauté mais rien n'est vraiment dit explicitement dans le livre. Ce que j'ai plutôt ressenti c'est que Tess se bloquait elle-même dans la vie car elle n'acceptait sa faute. Sa faute, nous pouvons en parler. Ce n'est pas dit explicitement mais la pauvre se fait violer par le dénommé Alec. C'est-à-dire qu'il la ramène "de force" chez elle, se perd dans la forêt, la travaille au corps en lui parlant sans cesse pour tenter de la convaincre et la pauvre Tess, jeune et innocente comme elle est, finit par baisser la garde et se fait avoir tout simplement.
Tess n'est d'ailleurs pas la seule à pouvoir être incriminée. Angel ne vaut pas beaucoup mieux. Beaucoup de beaux discours mais quand la réalité est là, il n'y a plus personne. Je ne vais pas trop en dévoiler mais il lui faudra un périple au Brésil pour se rendre compte de ses erreurs... Bref, ça n'a pas vraiment marché pour moi.
Mais ne croyez pas que le livre est mauvais pour autant. Je pense que ce ces personnages ne sont pas des fautes littéraires. Je pense aussi qu'il existe beaucoup de gens ainsi sur Terre. Et si je n'aime pas juger, je dois bien reconnaître que je ne suis pas parfait et qu'il y a des choses que j'ai du mal à accepter. Je ne peux pas accepter qu'on ne lutte pas contre son "destin". Si je sais qu'on n'est jamais totalement libre, je pense toutefois qu'on peut se rebeller contre soi-même et qu'on n'ingère pas forcément tout ce que nous donne nos parents, l'école ou encore la société. Il est toujours possible de remettre en question ce que nous avons appris et ce que nous croyons être naturel. C'est extrêmement difficile, j'en suis conscient, mais c'est possible.
Ainsi, les pauvres Tess et Angel sont bien à plaindre. Mais je les pense responsables, tout du moins en partie, de leurs malheurs. Est-ce à dire que je les condamne ? Non bien sûr. Si je ne me prive pas pour juger le péché, je me garde de regarder le pécheur. Nous sommes tous porteurs de "fautes" et vivre n'est jamais facile même quand on en a l'impression.
En conclusion, si vous n'éprouvez pas les mêmes problèmes que moi, je vous conseille la lecture de ce roman. Dans le cas contraire, peut-être serait-il plus sage de passer votre chemin.
Comme d'habitude, un petit aperçu de ce qui vous attendra si vous décidez de vous plonger dans ce livre :
Citation:
Comme un plus grand que lui, à la question critique il ne répondit pas, et ils tombèrent dans le silence. Quelques minutes après, la respiration de Tess se fit plus régulière, son étreinte se desserra et elle s'endormit. La bande de pâleur argentée à l'orient rendait les lointains de la grande plaine sombres et proches, et tout l'énorme paysage portait cette empreinte de réserve, de taciturnité et d'indécision, habituelle avant l'aube. Les piliers de l'est et leurs architraves dressaient leurs silhouettes noires contre la lumière, plus loin, la grande pierre du Soleil à forme de flamme, et, à mi-chemin, la pierre du Sacrifice. Bientôt le vent de la nuit tomba et les petites mares frémissantes s'apaisèrent dans la coupe que formaient les creux des pierres. En même temps, quelque chose à peine plus gros qu'un poing sembla se mouvoir là-bas vers l'est où le terrain descendait : c'était la tête d'un homme qui approchait. Clare regretta de n'avoir pas continué sa route, mais à présent il n'y avait plus d'autre parti à prendre que de rester tranquille. L'homme vint droit au cercle de pilier où ils étaient. Clare entendu derrière lui comme un frottement de pieds. Se retournant, il vit par-dessus les colonnes couchées une autre silhouette, puis, avant qu'il s'en doutât, une autre était tout près sous un trilithon, à droite, et une autre à gauche.
L'aube tombait en plein sur l'homme qui venait de l'ouest et Clare vit qu'il était grand et qu'il marchait d'un pas militaire. Tous se resserrèrent dans un dessein évident. Le récit de Tess était donc vrai ? Bondissant sur ses pieds, Clare jeta les yeux autour de lui, cherchant une arme, une pierre détachée, un moyen de salut, n'importe quoi. Pendant ce temps, l'homme le plus rapproché arrivait sur lui.
Si ça intéresse des membres du forum j'ai récupéré " le livre mickey " le livre fantastique 274 pages N°1 Avril 2018
qui est du " les trésors du journal de mickey
J'ai récupéré ça dans les boites à livres dans ma city ! voila si ça intéresse quelqu'un PM je vous l'envérez gratis
Depuis plusieurs semaines ou mois, tu avais l'avatar anonyme de base. Si c'était involontaire, je ne sais pas d'où venait le problème, de chez toi ou chez moi ou du site, mais là je vois bien ton avatar d'un mec à bonnet.
Ha !!!!
Effectivement, ça veut dire que moi, j'avait mon avatar " sangoku drgaon ball sur son nuage magic "
donc, personne ne voyez l'avatar ok ? Je pense que ça vient du site ?
Parceque plusieurs fois quand je change l'avatar, ça bug !
Ça fonctionne, une fois sur 1000 en fait !
Ok merci CHAN pour l'avoir fait précisé cool.
J'aurait jamais était au courent du souci si tu m'en avait pas parler
Le Docteur Faustus de l'écrivain allemand Thomas Mann (1875-1955) raconte l'histoire de "la vie d'un compositeur allemand Adrian Leverkhün racontée par un ami".
Œuvre majeure de l'écrivain, le roman est une véritable somme littéraire sur la musique. À travers cette biographie, Mann nous raconte en fait la crise qui secoue progressivement l'Europe.
Pour faire simple, Sérénus Zeitblom, docteur en philosophie et ami du musicien, se fait l'écho de son ami maintenant décédé et prend la décision de raconter sa vie. Son ami, possédant des dons évidents pour la musique va, après avoir tenté une formation de théologie, se plonger dans la musique, plus précisément dans la composition. Toute son existence sera tournée vers cet art qui obsédera véritablement le musicien. Il l'obsédera au point qu'il le poussera à l'impensable : nouer un pacte avec le diable. En échange de son âme, Leverkhün se voit promettre une période créatrice d'un peu plus d'une vingtaine d'années. Le musicien se plongera de plus en plus profondément dans son art au point d'en perdre la tête. Est-ce à dire que le fantastique à sa place dans le roman ? Pas vraiment. Si l'épisode du contrat diabolique est rapporté en témoignage par la lecture de documents ayant appartenus au compositeur, aucune scène ne nous montre clairement qu'il en fut ainsi. Comment expliquer le mal du musicien alors ? La syphilis contractée auprès d'une prostituée alors qu'il était encore un jeune homme naïf et innocent. Leverkhün souffrira toute sa vie et n'aura de consolation que dans la musique, et encore, un temps seulement.
Thomas Mann ne serait pas Thomas Mann s'il se contentait de raconter une histoire un peu folle. Son œuvre, plus qu'un simple roman, est, comme je l'écrivais plus haut, une somme sur la musique. On y suit toute l'évolution de cet art dans toutes ses aspérités possibles. La musique des anges autant que celle du diable y est entendue. Mann a fournit un travail incroyable sur la musique. Je sais qu'il a eu beaucoup de contacts avec Adorno (théoricien de la musique très important) et qu'il s'est documenté très sérieusement. Son personnage, à la fois orgueilleux, torturé et fou, m'a fait penser à bon nombre de compositeurs ayant existé : Wolf ou Schönberg en sont de bons exemples. Pour l'anecdote, Leverkhün invente dans le roman la musique sériel ce qui fâchera énormément Schönberg qui exigera que soit indiqué qu'il fut à l'origine de cette nouvelle forme de composition musicale.
Le livre raconte une histoire ; le livre parle de musique ; il va en réalité beaucoup plus loin. Mann attache le destin de l'Allemagne à son héros courant à sa perte. Le livre, écrit aux USA entre 1943 et 1947, pleure sur le destin de ce pays ayant également conclu un pacte avec le diable – les nazis – se voyant ainsi dépossédée à son tour de son âme. Ainsi, il arrive d'entendre les bombes et la destruction tout autour du biographe pleurant sur le sort de son ami à la manière d'un Mann pleurant sur son pays à jamais perdu.
J'ai longtemps attendu avant de débuter la lecture de ce monument pour deux raisons : la première est que Mann n'est pas facile à lire (La Montagne magique, chef-d'œuvre de l'écrivain, est sans doute le livre le plus dur qu'il m'est été donné de lire) ; la deuxième, ça parle de musique et j'ai toujours peur de lire des bêtises quand on parle de musique. Sur le premier point, je ne suis pas en mesure de dire si l'ouvrage est plus simple que les autres du maître. Je connais sans doute trop le sujet pour être comparé avec un lecteur "lambda". En gros, l'ouvrage m'a paru être très abordable (plus que La Montagne magique) et m'a donné vraiment envie d'écouter les œuvres fictives du héros du roman. Il y a bien quelques bêtises qui sont dites à l'un ou à l'autre moment mais elles sont minimes et sont justifiables artistiquement parlant (pour faire simple, ce sont souvent des opinions du héros sur la musique). Une petite chose m'a embêté pourtant une ou deux fois : la manie de l'écrivain qui prétend ne pas savoir écrire. Je sais que le narrateur n'est pas l'écrivain mais cela m'embête toujours d'entendre dire le narrateur faire un travail de biographe alors qu'il ne sait pas écrire. Ça a été tellement fait par le passé qu'il faut arrêter ça. Qu'importe, c'est du détail ! J'ai pris vraiment beaucoup de plaisir à lire le livre qui est d'une richesse incroyable. Puis-je le conseiller pour autant ? Je ne sais pas trop car le livre demande des aptitudes solides en termes de culture et de pratique littéraire. Pour l'anecdote, j'ai mis à peu près un mois pour le finir. Ça peut paraître long, c'est normal. Même si j'étais très occupé tout le mois de mai, le livre ne peut pas se lire vite tellement il regorge d'informations. Vous voilà prévenus !
Pour finir, je vous propose, comme d'habitude, un extrait illustrant dans lequel le narrateur parle du chef-d'œuvre de Leverkhün comme une sorte de pendant infernal à la Neuvième Symphonie de Beethoven :
Citation:
Pendant ces années, nous, enfants de la geôle, nous rêvions d'un hymne de joie, de Fidelio, de la Neuvième Symphonie, pour célébrer la fête de l'aube, l'affranchissement de l'Allemagne, sa délivrance par elle-même. A présent, seul celui-là nous peut convenir et celui-là seul sera chanté du fond de notre âme : la plainte du fils de l'enfer, la plus terrible plainte humaine et divine qui, partant du sujet mais s'élargissent toujours davantage et en quelque sorte s'emparant du cosmos, ait jamais été entonnée sur terre.
Plainte, plainte ! Un De Profundis que mon zèle affectueux trouve sans égal. Néanmoins, du point de vue créateur, celui de l'histoire de la musique comme de la perfection personnelle, n'existe-t-il pas un rapport allègre, hautement triomphal, entre elle et l'effroyable don de la compensation et de la rançon ? N'est-ce pas la "percé" dont nous parlions entre nous quand nous débattions le destin de l'art, sa situation et son heure, chaque fois qu'il était question d'un problème, d'une possibilité paradoxale ? N'est-ce pas le regain – je ne voudrais pas dire et je le dis pourtant pour être précis – la reconstruction de l'expression, la suprême et la plus profonde manifestation du sentiment sur un plan intellectuel, avec une rigueur de la forme qui devait être atteinte pour que cette transmutation de la froideur calculatrice en harmonie expressive de l'âme, cette chaleur du cœur de la créature qui se confie, pût devenir une réalité ?
Pour savoir le reste de ce merveilleux passage, il faudra lire le livre ;-P
C'est l'histoire d'Etsuko, jeune veuve vivant chez son beau-père épris d'elle. La belle veuve, si elle est l'amant de son beau-père, ne l'aime pas ; elle lui préfère Yakichi, le jardinier de la maison. À ces trois personnes, il faut encore ajouter les enfants et les petits-enfants du patriarche. Tout le monde vit sous le même toit et chacun aime à s'occuper des affaires des autres. Personne n'est vraiment satisfait dans cette famille, hormis Yakichi qui, en homme simple, vaque à ses occupations et fricote de temps en temps avec la bonne. C'est sans compter le désir qu'il suscite à son insu et le regard que pose Etsuko sur son corps...
Autant le dire tout de suite, je n'ai vraiment pas aimé ce court roman. Je l'ai fini il y a une ou deux semaines déjà et je n'arrive pas à lui trouver une qualité. C'est une chose assez rare et une chose que je n'aime pas beaucoup à vrai dire. Qu'on se comprenne bien, je ne suis jamais heureux lorsqu'à la fin de livre, je me rends compte que je ne l'ai pas du tout aimé. J'aime la littérature et je suis toujours heureux de trouver de nouvelles choses. La plupart des livres sont critiquables et il est assez rare de tomber sur des chefs-d'œuvre. Tout ceci est intégré et cela ne me dérange pas le moins du monde. Je suis également conscient qu'il est toujours plus facile de critiquer que de proposer quelque chose mais zut, c'est vraiment trop mauvais ! Je ne comprends même pas comment le livre a pu être publié pour être honnête. Je vois bien que c'est l'œuvre d'un écrivain mais l'œuvre n'est vraiment pas travaillée. La traduction peut évidemment jouer mais je pense que le mal est plus profond : c'est plat, c'est fade, ça se veut subversif alors que ce n'est qu'un enchaînement de poncifs éculés ou totalement hors propos. Dans la même idée, Mishima impose au lecteur ses vérités qui sont, je suis désolé de le dire, souvent stupides, naïves ou encore simplistes. C'est vraiment le côté le plus détestable de l'écrivain ; j'ai raison parce que j'écris. J'ai coutume de dire à mes étudiants qu'un artiste, contrairement à un scientifique, a le droit de tout dire, même des bêtises. Ceci est vrai mais quand il dit des bêtises, ça reste des bêtises...
J'avais déjà lu Le pavillon d'or du même auteur et l'œuvre ne m'a pas laissé un souvenir très marqué non plus. Je me souviens encore un peu de l'histoire et de l'ambiance générale mais pas beaucoup plus. Et pour dire la vérité, je me demande pourquoi Mishima est si connu parmi les écrivains japonais. Sa vie est assez romanesque, c'est vrai, mais l'œuvre qu'il laisse n'est pas ce qu'on peut trouver de mieux parmi la littérature japonaise de son temps je pense. J'avoue avoir été bien refroidi par le roman et il me faudra un petit temps avant que je reprenne un ouvrage de Mishima.
Bref, vous l'aurez compris, je n'ai pas aimé.
Bonne lecture tout de même ^^
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Lao She (1899-1966) – jeu de mot avec "laoshi" qui veut dire "enseignant" – est souvent présenté comme étant l'écrivain du XXe siècle de Pékin. Son œuvre se déroule essentiellement dans la capitale chinoise même si, comme on le verra ici, ce n'est pas toujours le cas. Son œuvre la plus connue est sans aucun doute son roman fleuve : Quatre générations sous le même toit qui raconte la vie d'une famille pékinoise durant l'occupation japonaise. Ce livre, s'il est magnifique, n'est cependant pas le plus facile à lire. Je conseille de commencer par un ouvrage un peu plus "facile" : Le pousse-pousse qui narre les mésaventures d'un jeune garçon voulant devenir tireur de pousse-pousse.
J'ai fini, il y a plus ou moins une semaine, Messieurs Ma, père et fils. C'est l'histoire de deux Chinois, un père et son fils, venu en Angleterre au début du siècle dernier pour reprendre le commerce du frère décédé du père. Le roman est l'occasion pour Lao she de pointer plusieurs éléments dont : le racisme anti-chinois ; la faiblesse de la Chine et l'humiliation ressentie par ses habitants au début du XXe siècle ; une certaine fierté culturelle chinoise pouvant parfois tourner à l'arrogance – l'arrogance n'est pas l'apanage des Européens blancs ; des complexités sociales ; l'amour...
Le tout est écrit sur un ton très léger, quand ce n'est pas humoristique. Les situations se suivent et malgré l'horreur de ce qu'il peut être écrit, le lecteur peut se surprendre à rire tellement le ton est ironique et grinçant en même temps. Je n'ai pas ressenti de malaise en lisant le bouquin et j'ai été étonné de trouver des éléments que je pense encore vrais aujourd'hui. C'est une des grandes forces du romanciers. Les descriptions sont saisissantes ; en quelques traits Lao She arrive à esquisser sans lourdeur l'environnement et les personnages. Cela sans le vrai et le vécu. Enfin, je dois mentionner le fait que s'il révèle des côtés sombres de l'Europe et des Européens, il n'est pas forcément plus conciliant avec les Chinois. De même, il n'est pas dans une dichotomie "bien >< mal" mais il présente les choses comme il pense qu'elles sont. Ainsi, les Européens ne sont pas tendres avec les Chinois – et c'est un euphémisme – pour autant, il n'hésite pas à mettre en avant leurs qualités quand il pense qu'ils en ont. Pour simplifier, le roman ne veut pas dire que les blancs sont méchants et que les Chinois sont gentils. Dernier élément, le livre se laisse lire très facilement ; les pages se tournent, ce qui est généralement, je pense, gage de qualité.
Petite réserve tout de même sur le troisième tiers du roman. J'ai trouvé que la fin manquait de souffle et que l'auteur n'a pas vraiment réussi à conclure son histoire. Mais je pense que ce n'est pas le plus important. Si ce n'est définitivement pas son chef-d'œuvre, c'est tout de même un ouvrage riche et drôle.
Comme d'habitude, un petit extrait dans lequel le père et le fils se retrouvent devant la tombe du frère de M. Ma :
Citation:
Le taxi longea la grille jusqu'à l'entrée. Ma Wei s'apprêtait à payer le taxi mais son père voulut absolument le faire attendre. A l'intérieur, devant les tombes, se dressait un petit bâtiment en briques rouges dont la cheminée fumait. Ils frappèrent à la grille et la porte s'entrouvrit, une tête ronde apparut lentement. Les grosses joues bougeaient comme pour accompagner le mouvement des mâchoires. Enfin, la porte s'ouvrit toute grande et le reste du corps suivit, montrant qu'il s'agissait d'une veille femme rondouillarde de très petite taille.
Aucun trait n'apparaissait sur son visage parfaitement lisse qui ressemblait à une boulette de viande. Quant son corps, si on avait enlevé les bras et les jambes, il eût fait penser à un petit rouleau de jardin. Tout en s'essuyant la bouche avec son tablier, elle leur demanda quelle tombe ils cherchaient. Elle s'approcha et c'est qu'alors qu'ils découvrirent qu'elle avait effectivement tous les éléments d'un visage et que ses yeux souriaient. Lorsqu'elle parlait, on voyait qu'elle n'avait qu'une seule dent, qui semblait d'autant plus imposante qu'en l'absence de compagnes, elle était seule maîtresse des lieux.
–Nous cherchons la tombe de Monsieur Ma, un Chinois, dit Ma Wei.
La vieille, qui avait maintenant fini de s'essuyer la bouche, continuait à tirer sur son tablier, probablement pour s'essuyer les yeux.
– Je sais. Je me rappelle. Il est mort l'automne dernier. Quel malheur ! dit-elle, tirant toujours sur son tablier. Il y avait trois couronnes sur son cercueil. Je me rappelle. Le 7 octobre. Le premier Chinois enterré ici. Le tout premier ! Quel malheur !
Elle versa alors quelques larmes qui coulèrent horizontalement, les bourrelets de chair de son visage ne leur permettant pas de s'écouler directement.
– Suivez-moi ! Je sais où c'est ! Je me rappelle !
Ils la suivirent. Ses petites jambes ressemblaient aux pattes des canetons qui viennent d'éclore et la chair de ses joues tremblait comme la gelée de poisson que les Chinois mangent en hiver.
Ils marchèrent longtemps. Elle leur montra une petite stèle en disant :
– C'est ici !
Ils s'approchèrent. Le nom gravé était celui d'un étranger. Avant qu'ils aient eu le temps de le lui faire remarquer, elle dit :
– Je me suis trompée ! C'est plus loin ! Je sais ! Je me rappelle ! Le premier Chinois !
Ils marchèrent encore un bon moment. Ma Wei, qui avait une bonne vue, fut le premier à apercevoir les caractères chinois. Il tira son père en direction de la tombe.
– C'est juste ! C'est bien ici ! Je me rappelle ! Je sais !
La vieille, derrière leur dos, montrait de son doigt boudiné la tombe qu'ils avaient déjà trouvée.
Sur la stèle, haute d'environ un mètre, étaient gravés le nom de l'oncle de Ma Wei, Ma Weiren, et les dates de sa naissance et de sa mort. La stèle était en matériau synthétique, grise avec un motif violet. Les couronnes qui étaient posées devant avaient été totalement délavées par la pluie, et les banderoles de papier avaient été emportées par le vent. Quelques fleurs sauvages d'un jaune pâle étaient écloses et les gouttes de rosée qui s'attardaient sur les pétales pu faire penser à des larmes.
Le ciel noir, les tombes, les couronnes éparses, tout contribuait à créer une atmosphère mélancolique et lugubre. Monsieur Ma, envahi par la tristesse, ne put s'empêcher de pleurer. Et Ma Wei, bien qu'il n'eût pas connu son oncle, sentit les larmes lui venir aux yeux.
Le vieux MA, oubliant Ma Wei et la vieille, s'agenouilla devant la tombe et se prosterna trois fois en disant à voix basse :
– Grand frère, protège ton frère pour qu'il réussisse dans ses affaires et puisse te ramener en Chine.
Ayant prononcé ces mots, ne pouvant contenir plus longtemps sa douleur, il éclata en sanglots.
Ma Wei, debout derrière son père, s'inclina trois fois. La vieille s'était approchée et pleurait si fort que son visage était inondé de larmes. Et comme elle ne pouvait tirer assez haut son tablier, elle s'essuyait les yeux en se frottant le visage en tous sens avec ses mains. Sans arrêter de pleurer, elle proposa :
– Si vous voulez des fleurs fraîches, j'en ai.
– Combien ? demanda Ma Wei.
– Apportez-les, dit Monsieur Ma, toujours agenouillé.
– Bien, je vais les chercher.
Elle releva son tablier pour pouvoir aller plus vite, mais ses genoux se refusaient absolument à plier, si bien qu'elle s'éloigna en semblant se balancer d'avant en arrière comme si elle marquait le pas.
Au bout d'un long moment, elle revint, toujours en se dandinant, le cou et le visage aussi rogs que les briques de sa maison. Tenant son tablier d'une main et un bouquet d'œillets orange de l'autre.
– Voici leș fleurs, monsieur, toutes fraîches !
Ses mains tremblaient en les tendant au vieux Ma. Il resserra le fil de fer d'une couronne est y piqua les fleurs. Quand il eut fini, il reposa la couronne devant la stèle, recula de deux pas et l'examina. Ses larmes se remirent à couler.
Il pleurait et la vieille pleurait aussi. "Et l'argent !" Tout en pleurant de plus belle, elle tendit la main. "Et l'argent !"
Sans un mot, Monsieur Ma lui tendu un billet de dix shillings.
Elle regarda me billet et leva les yeux pour examiner Monsieur Ma tout en disant :
– Merci ! Merci ! le tout premier Chinois enterré ici ! Merci J'espère qu'il en mourra beaucoup et qu'ils se feront tous enterrer ici.
La dernière phrase n'était destinée qu'à elle-même mais, comme elle l'avait prononcée à voix haute, le père et le fils l'entendirent très clairement.
Un rayon de soleil perça soudain les nuages et projeta leur nombre sur la stèle, rendant encore plus morne cet endroit où un homme était enterré. Monsieur Ma poussa un soupir, essuya ses larmes et se retourna :
– Ma Wei, rentrons !
@ bakosaint
Ah oui merci. Je l'avais déjà noté celui-là mais je ne l'ai pas encore acheté. M'enfin, je sais qu'il fait partie de ses chefs-d'œuvre donc je n'y couperai pas ^^
Mais je dois dire que j'ai été agréablement surpris par le style de Kessel. Je ne m'attendais pas du tout à ce que ce soit si écrit. Comme quoi, on a toujours des surprises en littérature =)
Pour les deux autres auteurs que tu cites, je dois bien avouer que je ne les connais pas. Dans le même genre — au sens large, parce que je ne le connais vraiment pas — j'ai dans ma pile Toni Morrison que je dois lire un jour où l'autre. J'attends le bon moment comme on dit. Mais merci pour les noms, je regarderai ça de plus près ;-)
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
J'ai fini il n'y a pas longtemps Tess d'Urberville de Thomas Hardy (1840-1928).
C'est l'histoire des malheurs d'une jeune fille, voilà comment résumer le propos du bouquin.
Suite aux demandes de ses parents, Tess s'en va dans une famille bourgeoise de la région avec qui ils auraient des liens de parentés. Bien que portant plus ou moins le même patronyme, ils ne sont pourtant pas de la même lignée. Les bourgeois, en effet, ont abusé du nom et pour se donner de la contenance, se sont inventés une histoire en usurpant le nom d'une ancienne famille de nobles dont la lignée s'est éteinte ou plutôt "corrompue" au fil du temps. C'est là que commencent les malheurs de la pauvre Tess.
Il faut dire qu'elle est très belle et qu'elle attire l'œil la donzelle. En arrivant chez ses "cousins" — entendez les usurpateurs — elle rencontre celui qui sera la cause de tous ses chagrins : Alec d'Urberville. La jeune fille est successivement séduite, trompée et abandonnée à son sort. Elle mettra un enfant au monde ; enfant qui ne survivra pas longtemps. Mais si l'enfant passera à trépas, il en sera autrement pour la faute qu'il symbolisait. Tess est coupable d'une faute irrémissible dans cette société anglaise puritaine de la fin du XIXe siècle. Elle fera la rencontre d'un autre homme, Angel Clare qui tombera amoureux d'elle et se fera à son tour aimé d'elle. Ils se rapprocheront au fur et à mesure du temps passé ensemble jusqu'à un événement particulier qui changera complètement la donne. L'histoire ne se termine pas très bien, comme vous pouvez déjà vous en douter.
Voilà pour l'intrigue principale. Ai-je aimé cette lecture ? Pour parler vrai, pas vraiment. Je peux même dire que je ne l'ai pas aimée du tout. Le livre est-il mauvais ? Je ne pense pas. Thomas Hardy est un vrai écrivain qui parvient à rendre l'atmosphère juste, les descriptions attrayantes et le rythme soutenu. Même si je l'ai lu en traduction, j'ai pu sentir qu'il avait une vraie personnalité littéraire, ce qui n'est pas rien. L'histoire en elle-même ? Je ne pense pas qu'elle pause problème. Elle marche, comme on dit. Bien sûr, quelques scènes pourraient être retravaillées mais il est possible de retravailler n'importe qu'elle œuvre au fond et cela importe peu. Non, ce qui m'a particulièrement embêté, ce sont les personnages eux-mêmes.
Comment expliquer la chose... ils donnent l'impression d'être vides. Ils ne sont que des victimes qui passent leur temps à subir des événements qui, la plupart du temps, sont infligées par eux-mêmes. Ils souffrent, la chose est claire, mais leur souffrance émane bien souvent d'eux-mêmes. Ils me font penser à ces gens qui, sous prétexte qu'ils sont obèses, voient de la grossophobie partout. Je ne dis pas que la grossophobie n'existe pas bien entendu mais certains témoignages entendus sont parfois discutables. Par exemple, lorsque j'entends une personne dire qu'elle fut victime de grossophobie à la boulangerie parce qu'une personne entendant qu'elle avait commandé deux croissant a osé dire : "pour moi, un seul suffira", je trouve qu'il est difficile de pouvoir affirmer que c'est un acte grossophobe. Ce n'est pas l'objet du livre mais l'exemple montre bien ce que je veux expliquer : il arrive que les torts que nous pensons subir soient en fait infligés par nous-mêmes.
Bien sûr que la pauvre Tess est jugée par la communauté mais rien n'est vraiment dit explicitement dans le livre. Ce que j'ai plutôt ressenti c'est que Tess se bloquait elle-même dans la vie car elle n'acceptait sa faute. Sa faute, nous pouvons en parler. Ce n'est pas dit explicitement mais la pauvre se fait violer par le dénommé Alec. C'est-à-dire qu'il la ramène "de force" chez elle, se perd dans la forêt, la travaille au corps en lui parlant sans cesse pour tenter de la convaincre et la pauvre Tess, jeune et innocente comme elle est, finit par baisser la garde et se fait avoir tout simplement.
Tess n'est d'ailleurs pas la seule à pouvoir être incriminée. Angel ne vaut pas beaucoup mieux. Beaucoup de beaux discours mais quand la réalité est là, il n'y a plus personne. Je ne vais pas trop en dévoiler mais il lui faudra un périple au Brésil pour se rendre compte de ses erreurs... Bref, ça n'a pas vraiment marché pour moi.
Mais ne croyez pas que le livre est mauvais pour autant. Je pense que ce ces personnages ne sont pas des fautes littéraires. Je pense aussi qu'il existe beaucoup de gens ainsi sur Terre. Et si je n'aime pas juger, je dois bien reconnaître que je ne suis pas parfait et qu'il y a des choses que j'ai du mal à accepter. Je ne peux pas accepter qu'on ne lutte pas contre son "destin". Si je sais qu'on n'est jamais totalement libre, je pense toutefois qu'on peut se rebeller contre soi-même et qu'on n'ingère pas forcément tout ce que nous donne nos parents, l'école ou encore la société. Il est toujours possible de remettre en question ce que nous avons appris et ce que nous croyons être naturel. C'est extrêmement difficile, j'en suis conscient, mais c'est possible.
Ainsi, les pauvres Tess et Angel sont bien à plaindre. Mais je les pense responsables, tout du moins en partie, de leurs malheurs. Est-ce à dire que je les condamne ? Non bien sûr. Si je ne me prive pas pour juger le péché, je me garde de regarder le pécheur. Nous sommes tous porteurs de "fautes" et vivre n'est jamais facile même quand on en a l'impression.
En conclusion, si vous n'éprouvez pas les mêmes problèmes que moi, je vous conseille la lecture de ce roman. Dans le cas contraire, peut-être serait-il plus sage de passer votre chemin.
Comme d'habitude, un petit aperçu de ce qui vous attendra si vous décidez de vous plonger dans ce livre :
Bonne lecture !
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Si ça intéresse des membres du forum j'ai récupéré " le livre mickey " le livre fantastique 274 pages N°1 Avril 2018
qui est du " les trésors du journal de mickey
J'ai récupéré ça dans les boites à livres dans ma city ! voila si ça intéresse quelqu'un PM je vous l'envérez gratis
Aaaah, tu t'es trouvé un avatar, Tekno, tu me fais plaisir :D
Hein ? Chuck j'ai toujour eu un avatard le dernier c'est sangoku de dragon ball ?
Pourquoi tu me dit ça ? j'ai pas saisie " :) "
Depuis plusieurs semaines ou mois, tu avais l'avatar anonyme de base. Si c'était involontaire, je ne sais pas d'où venait le problème, de chez toi ou chez moi ou du site, mais là je vois bien ton avatar d'un mec à bonnet.
Ha !!!!
Effectivement, ça veut dire que moi, j'avait mon avatar " sangoku drgaon ball sur son nuage magic "
donc, personne ne voyez l'avatar ok ? Je pense que ça vient du site ?
Parceque plusieurs fois quand je change l'avatar, ça bug !
Ça fonctionne, une fois sur 1000 en fait !
Ok merci CHAN pour l'avoir fait précisé cool.
J'aurait jamais était au courent du souci si tu m'en avait pas parler
Le Docteur Faustus de l'écrivain allemand Thomas Mann (1875-1955) raconte l'histoire de "la vie d'un compositeur allemand Adrian Leverkhün racontée par un ami".
Œuvre majeure de l'écrivain, le roman est une véritable somme littéraire sur la musique. À travers cette biographie, Mann nous raconte en fait la crise qui secoue progressivement l'Europe.
Pour faire simple, Sérénus Zeitblom, docteur en philosophie et ami du musicien, se fait l'écho de son ami maintenant décédé et prend la décision de raconter sa vie. Son ami, possédant des dons évidents pour la musique va, après avoir tenté une formation de théologie, se plonger dans la musique, plus précisément dans la composition. Toute son existence sera tournée vers cet art qui obsédera véritablement le musicien. Il l'obsédera au point qu'il le poussera à l'impensable : nouer un pacte avec le diable. En échange de son âme, Leverkhün se voit promettre une période créatrice d'un peu plus d'une vingtaine d'années. Le musicien se plongera de plus en plus profondément dans son art au point d'en perdre la tête. Est-ce à dire que le fantastique à sa place dans le roman ? Pas vraiment. Si l'épisode du contrat diabolique est rapporté en témoignage par la lecture de documents ayant appartenus au compositeur, aucune scène ne nous montre clairement qu'il en fut ainsi. Comment expliquer le mal du musicien alors ? La syphilis contractée auprès d'une prostituée alors qu'il était encore un jeune homme naïf et innocent. Leverkhün souffrira toute sa vie et n'aura de consolation que dans la musique, et encore, un temps seulement.
Thomas Mann ne serait pas Thomas Mann s'il se contentait de raconter une histoire un peu folle. Son œuvre, plus qu'un simple roman, est, comme je l'écrivais plus haut, une somme sur la musique. On y suit toute l'évolution de cet art dans toutes ses aspérités possibles. La musique des anges autant que celle du diable y est entendue. Mann a fournit un travail incroyable sur la musique. Je sais qu'il a eu beaucoup de contacts avec Adorno (théoricien de la musique très important) et qu'il s'est documenté très sérieusement. Son personnage, à la fois orgueilleux, torturé et fou, m'a fait penser à bon nombre de compositeurs ayant existé : Wolf ou Schönberg en sont de bons exemples. Pour l'anecdote, Leverkhün invente dans le roman la musique sériel ce qui fâchera énormément Schönberg qui exigera que soit indiqué qu'il fut à l'origine de cette nouvelle forme de composition musicale.
Le livre raconte une histoire ; le livre parle de musique ; il va en réalité beaucoup plus loin. Mann attache le destin de l'Allemagne à son héros courant à sa perte. Le livre, écrit aux USA entre 1943 et 1947, pleure sur le destin de ce pays ayant également conclu un pacte avec le diable – les nazis – se voyant ainsi dépossédée à son tour de son âme. Ainsi, il arrive d'entendre les bombes et la destruction tout autour du biographe pleurant sur le sort de son ami à la manière d'un Mann pleurant sur son pays à jamais perdu.
J'ai longtemps attendu avant de débuter la lecture de ce monument pour deux raisons : la première est que Mann n'est pas facile à lire (La Montagne magique, chef-d'œuvre de l'écrivain, est sans doute le livre le plus dur qu'il m'est été donné de lire) ; la deuxième, ça parle de musique et j'ai toujours peur de lire des bêtises quand on parle de musique. Sur le premier point, je ne suis pas en mesure de dire si l'ouvrage est plus simple que les autres du maître. Je connais sans doute trop le sujet pour être comparé avec un lecteur "lambda". En gros, l'ouvrage m'a paru être très abordable (plus que La Montagne magique) et m'a donné vraiment envie d'écouter les œuvres fictives du héros du roman. Il y a bien quelques bêtises qui sont dites à l'un ou à l'autre moment mais elles sont minimes et sont justifiables artistiquement parlant (pour faire simple, ce sont souvent des opinions du héros sur la musique). Une petite chose m'a embêté pourtant une ou deux fois : la manie de l'écrivain qui prétend ne pas savoir écrire. Je sais que le narrateur n'est pas l'écrivain mais cela m'embête toujours d'entendre dire le narrateur faire un travail de biographe alors qu'il ne sait pas écrire. Ça a été tellement fait par le passé qu'il faut arrêter ça. Qu'importe, c'est du détail ! J'ai pris vraiment beaucoup de plaisir à lire le livre qui est d'une richesse incroyable. Puis-je le conseiller pour autant ? Je ne sais pas trop car le livre demande des aptitudes solides en termes de culture et de pratique littéraire. Pour l'anecdote, j'ai mis à peu près un mois pour le finir. Ça peut paraître long, c'est normal. Même si j'étais très occupé tout le mois de mai, le livre ne peut pas se lire vite tellement il regorge d'informations. Vous voilà prévenus !
Pour finir, je vous propose, comme d'habitude, un extrait illustrant dans lequel le narrateur parle du chef-d'œuvre de Leverkhün comme une sorte de pendant infernal à la Neuvième Symphonie de Beethoven :
Pour savoir le reste de ce merveilleux passage, il faudra lire le livre ;-P
Bonne lecture !
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Une soif d'amour de Yukio Mishima (1925-1970).
C'est l'histoire d'Etsuko, jeune veuve vivant chez son beau-père épris d'elle. La belle veuve, si elle est l'amant de son beau-père, ne l'aime pas ; elle lui préfère Yakichi, le jardinier de la maison. À ces trois personnes, il faut encore ajouter les enfants et les petits-enfants du patriarche. Tout le monde vit sous le même toit et chacun aime à s'occuper des affaires des autres. Personne n'est vraiment satisfait dans cette famille, hormis Yakichi qui, en homme simple, vaque à ses occupations et fricote de temps en temps avec la bonne. C'est sans compter le désir qu'il suscite à son insu et le regard que pose Etsuko sur son corps...
Autant le dire tout de suite, je n'ai vraiment pas aimé ce court roman. Je l'ai fini il y a une ou deux semaines déjà et je n'arrive pas à lui trouver une qualité. C'est une chose assez rare et une chose que je n'aime pas beaucoup à vrai dire. Qu'on se comprenne bien, je ne suis jamais heureux lorsqu'à la fin de livre, je me rends compte que je ne l'ai pas du tout aimé. J'aime la littérature et je suis toujours heureux de trouver de nouvelles choses. La plupart des livres sont critiquables et il est assez rare de tomber sur des chefs-d'œuvre. Tout ceci est intégré et cela ne me dérange pas le moins du monde. Je suis également conscient qu'il est toujours plus facile de critiquer que de proposer quelque chose mais zut, c'est vraiment trop mauvais ! Je ne comprends même pas comment le livre a pu être publié pour être honnête. Je vois bien que c'est l'œuvre d'un écrivain mais l'œuvre n'est vraiment pas travaillée. La traduction peut évidemment jouer mais je pense que le mal est plus profond : c'est plat, c'est fade, ça se veut subversif alors que ce n'est qu'un enchaînement de poncifs éculés ou totalement hors propos. Dans la même idée, Mishima impose au lecteur ses vérités qui sont, je suis désolé de le dire, souvent stupides, naïves ou encore simplistes. C'est vraiment le côté le plus détestable de l'écrivain ; j'ai raison parce que j'écris. J'ai coutume de dire à mes étudiants qu'un artiste, contrairement à un scientifique, a le droit de tout dire, même des bêtises. Ceci est vrai mais quand il dit des bêtises, ça reste des bêtises...
J'avais déjà lu Le pavillon d'or du même auteur et l'œuvre ne m'a pas laissé un souvenir très marqué non plus. Je me souviens encore un peu de l'histoire et de l'ambiance générale mais pas beaucoup plus. Et pour dire la vérité, je me demande pourquoi Mishima est si connu parmi les écrivains japonais. Sa vie est assez romanesque, c'est vrai, mais l'œuvre qu'il laisse n'est pas ce qu'on peut trouver de mieux parmi la littérature japonaise de son temps je pense. J'avoue avoir été bien refroidi par le roman et il me faudra un petit temps avant que je reprenne un ouvrage de Mishima.
Bref, vous l'aurez compris, je n'ai pas aimé.
Bonne lecture tout de même ^^
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)
Lao She (1899-1966) – jeu de mot avec "laoshi" qui veut dire "enseignant" – est souvent présenté comme étant l'écrivain du XXe siècle de Pékin. Son œuvre se déroule essentiellement dans la capitale chinoise même si, comme on le verra ici, ce n'est pas toujours le cas. Son œuvre la plus connue est sans aucun doute son roman fleuve : Quatre générations sous le même toit qui raconte la vie d'une famille pékinoise durant l'occupation japonaise. Ce livre, s'il est magnifique, n'est cependant pas le plus facile à lire. Je conseille de commencer par un ouvrage un peu plus "facile" : Le pousse-pousse qui narre les mésaventures d'un jeune garçon voulant devenir tireur de pousse-pousse.
J'ai fini, il y a plus ou moins une semaine, Messieurs Ma, père et fils. C'est l'histoire de deux Chinois, un père et son fils, venu en Angleterre au début du siècle dernier pour reprendre le commerce du frère décédé du père. Le roman est l'occasion pour Lao she de pointer plusieurs éléments dont : le racisme anti-chinois ; la faiblesse de la Chine et l'humiliation ressentie par ses habitants au début du XXe siècle ; une certaine fierté culturelle chinoise pouvant parfois tourner à l'arrogance – l'arrogance n'est pas l'apanage des Européens blancs ; des complexités sociales ; l'amour...
Le tout est écrit sur un ton très léger, quand ce n'est pas humoristique. Les situations se suivent et malgré l'horreur de ce qu'il peut être écrit, le lecteur peut se surprendre à rire tellement le ton est ironique et grinçant en même temps. Je n'ai pas ressenti de malaise en lisant le bouquin et j'ai été étonné de trouver des éléments que je pense encore vrais aujourd'hui. C'est une des grandes forces du romanciers. Les descriptions sont saisissantes ; en quelques traits Lao She arrive à esquisser sans lourdeur l'environnement et les personnages. Cela sans le vrai et le vécu. Enfin, je dois mentionner le fait que s'il révèle des côtés sombres de l'Europe et des Européens, il n'est pas forcément plus conciliant avec les Chinois. De même, il n'est pas dans une dichotomie "bien >< mal" mais il présente les choses comme il pense qu'elles sont. Ainsi, les Européens ne sont pas tendres avec les Chinois – et c'est un euphémisme – pour autant, il n'hésite pas à mettre en avant leurs qualités quand il pense qu'ils en ont. Pour simplifier, le roman ne veut pas dire que les blancs sont méchants et que les Chinois sont gentils. Dernier élément, le livre se laisse lire très facilement ; les pages se tournent, ce qui est généralement, je pense, gage de qualité.
Petite réserve tout de même sur le troisième tiers du roman. J'ai trouvé que la fin manquait de souffle et que l'auteur n'a pas vraiment réussi à conclure son histoire. Mais je pense que ce n'est pas le plus important. Si ce n'est définitivement pas son chef-d'œuvre, c'est tout de même un ouvrage riche et drôle.
Comme d'habitude, un petit extrait dans lequel le père et le fils se retrouvent devant la tombe du frère de M. Ma :
Bonne lecture !
"La plus grande consolation pour la médiocrité est de voir que le génie n'est pas immortel" (Johann Wolfgang von Gœthe)