[Jeu/Découverte] - TriMovies le Renouveau

La fin absolue du monde (Cigarette burns) de John Carpenter.

Kirby (qui n'est pas interprété par un marshmallow rose mais par Norman Reedus sans son arbalète) est le gérant d'un petit cinéma diffusant des films plutôt orientés horreur. Ex-toxicomane dont la petite amie s'est suicidée, il doit énormément d'argent à son ex beau-père qui le tient comme personnellement responsable de la mort de sa fille. Pour arrondir ses fins de mois et rembourser sa dette, Kirby est aussi expert en films rares e-t est chargé par différents collectionneurs de retrouver des copies de films rares. C'est le cas de Bellinger, un richissime collectionneur excentrique et inquiétant qui lui demande de retrouver l'unique copie du film La fin absolue du Monde, un film d'horreur légendaire qui, lors de son unique diffusion 30 ans auparavant, aurait créer des émeutes dans la salle. Pour preuve, Bellinger a retrouvé et enchaîné une créature étrange aux ailes arrachées dont l'existence semble liée à celle du film.

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Crée par Mike Harris, la série Master of Horrors part du postulat de base de damnder à la crème de la crème des habitués du film d'horreur de réaliser un épisode pour la série avec comme contrainte un synopsis tiré au sort et un budget limité. Nombre de réalisateurs se sont prêtés à l'exercice. Parmi eux Dario Argento, Tobe Hooper, John Landis, Takeshi Miike et bien sûr l'incontournable John Carpenter, en pré-retraite depuis la fin des années 90.
Si certains réalisateurs ont foiré leur exercices, ce n'est pas le cas de Carpenter, plutôt inspiré pour son épisode et ayant largement l'habitude des contraintes budgétaires.

Anecdote N°1: Assez rigolo, au début du film, le collectionneur Bellinger dit qu'il a préféré voir lors de la seule et unique diffusion de La fin absolue du Monde lors du festival du film fantastique de Sitges, un autre film qui est L'abominable Dr Phibes. Ce film est également proposé par LENNETH dans sa liste. Alors? Hasard ou choix délibéré?

Anecdote N°2: La version originale de cet épisode a pour titre Cigarette Burns. Cela fait directement référence au monde de la projection cinéma car les projectionnistes marquaient leurs films d'un poinçon sur la bobine ressemblant à une brûlure de cigarette aux endroits où il y avait coupe et raccordement à faire. C'est également une référence aux flashs lugubres du personnage principal qui prennent forme dans un cercle incandescent.

Ce qui est bien chez Carpenter, c'est qu'il assume complètement le côté "cheap" de ses films pour les transcender. L'épisode a été tourné au milieu des années 2000 mais possède un réel cachet eighties qui ravira tous les nostalgiques. Son sens de la mise en scène est toujours efficace et il a un incroyable don pour distiller une ambiance particulière à ses films. Il joue en permanence avec la nuit et les ombrages, et ne se sert jamais (ou quasiment jamais) d'artifices et poncifs du genre tel que les screamers. Un réalisateur à la patte unique et reconnaissable, ça ne court pas forcément les rues et c'est toujours appréciable.
La musique marque elle aussi la sauce à la "Carpenter". Elle n'est pas composée par ses soins, mais ça reste dans la famille, vu que c'est composé par son fils Cody ;). Celui-ci reprend la formule qui a fait le succès de son père, à savoir une mélodie simple et efficace. Jouée au piano, elle n'est pas sans rappeler celle du film Halloween.

Le film en lui-même se décompose en deux parties. Une première partie centrée sur l'enquête de Kirby pour retrouver le film qui a une aura devenant de plus en plus sombre et inquiétante à mesure que le héros se rapproche du film. La deuxième partie, quant à elle, se concentre sur la livraison du film et son visionnage avec son lot de conséquences permettant à Carpenter de lâcher les chevaux sur les effets gore. Mention spéciale pour le type mettant ses tripes dans l'appareil de projection à la manière d'une bobine de film.
La première partie est peut-être celle que j'aime le moins. Bien que plutôt réussie et faisant fortement penser aux films L'antre de la folie ou La neuvième porte, elle est quand même assez longue à mettre en place et comporte son lot d'incohérences. La montée en angoisse et le mystère opaque autour du film s'épaissit très subtilement à mesure que l'épisode avance, mais on se pose parfois certaines questions. La façon dont Kirby se libère du type réalisant les films gores "maison" est un peu hasardeuse et paresseuse, et le lieu où il finit par trouver le film, on peut légitimement se poser la question du pourquoi il n'a pas été voir de ce côté là d'entrée. Enfin bref, c'est au final pas si gênant et si on commence à chercher les incohérences dans tous les films d'horreur, on n'aura jamais fini. Mais bon, sur une partie mettant l'accent sur un côté enquête, plus de rigueur aurait sans doute été appréciable.
La deuxième partie, par contre, elle fera plaisir à tous les amateurs du genre. La diffusion du film et ses conséquences aux allures gores et cauchemardesques, c'est délicieusement horrible. Bien sûr, c'est difficile d'assumer les attentes car tout le long du film, le spectateur attend que cette fameuse diffusion soit à la hauteur des rumeurs, mais c'est vraiment bien géré. La seule erreur de Carpenter selon moi est d'avoir montré quelques images du fameux film "maudit" lui faisant perdre tout son caractère sacré et sa force. La suggestion pure et dure aurait à mon sens mieux fonctionné. La toute fin du film, drôle et décalée, je l'ai trouvé absolument géniale, mais elle peut dérouter.

Au final, cet épisode de Master of Horror centré sur un film d'horreur de légende permet à Carpenter de crier haut et fort son amour pour un genre qu'il affectionne particulièrement et de prouver une nouvelle fois avec maestria qu'il fait bien parti de ce club très fermé des "Maîtres de l'horreur". Quant à Norman Reedus, il s'en sort plutôt bien, et tout ça sans tirer un seul carreau d'arbalète. Là je dis chapeau.