La trilogie : Soul Blazer / Illusion of Time / Terranigma

Il était une fois, un univers... il était une fois, un héros... il était une fois, une trilogie. Non je ne parle pas de Matrix, mais bel et bien des jeux vidéo développés par Quintet, qui répondent chronologiquement au nom de :

- Soul Blazer (1992)
- Illusion of Time (1993)
- Terranigma (1995)

Recontextualisons :

A une époque où les européens sont privés des jeux grandioses de l'orient, à une époque où règnent des titres tels que Zelda ALTTP ou encore Secret of Mana comme maîtres du genre Action-RPG, une "série" semble échapper aux mailles du filet : la saga blazer. En effet, peu nombreux sont les RPGs japonais à avoir bénéficié d'une sortie européenne ainsi que d'une traduction française...

Le studio Quintet est aussi connu pour avoir développé Actraiser (1 & 2), deux oeuvres originales et passionnantes (moitié aventure, moitié gestion). Notons également un jeu un peu plus récent, The Granstream Saga (1999), parfois considéré comme le "quatrième opus" de la saga, exceptionnel par bien des aspects, mais qui a foutrement bidé au niveau des ventes. En somme, un studio assez réservé mais pas moins talentueux.

Présentons maintenant ce qui nous intéresse, à savoir les trois jeux jeux qui, sans réellement se suivre scénaristiquement, révèlent un monde similaire, partagent une ambiance semblable, exposent une philosophie analogue :

Premier action-RPG de la trilogie. On ressent dès le début du jeu une influence énorme de la part d'Actraiser. L'on dirige un être divin dont la quête consiste à "repeupler" le monde, cerné par le chaos, bercé par le mal. S'il est bien un thème récurrent dans cette série, c'est l'opposition entre le bien et le mal : ici, il est bien question des gentils, des méchants, et de la guerre entre les deux factions. Manichéen oui, mais pas complètement naïf pour autant. La trame se suit sans problème, certains passages sont vraiment tristes, c'est crédible, mais ça ne va pas vous empêcher de dormir.

Qui dit RPG dit expérience : la règle est respectée, vous tuez des monstres pour renforcer votre personnage, vous gagnez des dons et magies au fur et à mesure de votre quête, bref tout va bien, le système reste assez basique. Trop basique ? Disons que votre panoplie de mouvements est restreinte au possible, et que les combats sont un chouïa trop répétitifs. Si l'on doit le comparer au Zelda de la SNES, on le trouvera peut être moins inspiré, mais peut être plus dynamique. A vous de juger, manette/clavier en mains.

Les graphismes sont soignés, même si peu diversifiés. En même temps, on est en 1992, soit aux balbutiements de la SNES, surtout en ce qui concerne les RPGs (Chrono Trigger n'était même pas à l'état de projet...) Au niveau sonore, on est encore loin des deux autres opus, mais l'on sent déjà la volonté musicale de faire quelque chose d'épique et puissant. Certains bruitages sont d'ailleurs empruntés directement d'Actraiser (et seront utilisés de la même manière dans Illusion of Time et Terranigma pour notre plus grand bonheur!)

Au final, oui c'est un bon jeu, sans nul doute. C'est aussi l'un des pionniers du genre de l'ère 16-bits... si vous n'y avez jamais touché, je vous le conseille en émulation (car déjà la cartouche est moche, et en plus elle fait mal au cul au vu de son prix actuel) rien que pour l'ambiance, pour le fun qu'il dégage, et pour votre culture, évidemment.

Quelle est cette manie de toujours renommer les jeux en Europe ? Dingue ça, genre on est trop con pour savoir que Gaia est la déesse représentative de la terre dans la mythologie grecque, sachant que la planète est au centre du jeu. Non au lieu de ça, on a Time. Si quelqu'un a une explication de ce Time vis-à-vis du scénario, je suis à l'écoute. Bref...

Deuxième opus de la saga Quintet, Illusion of Time est l'incontournable. Tellement incontournable que le hooper lui-même s'y est frotté (http://www.dailymotion.com/video/x65mvd_video-test-illusion-of-time-snes_videogames)
En plus du manichéisme apporté par le premier épisode (gaïa/dark gaïa) s'ajoute un nouveau thème aussi présent dans Terranigma, celui de l'adolescence, un sujet qui plaît beaucoup aux mangakas (y a qu'à voir les shonens en vogue). A cause de ça, les dialogues sont assez bas de plafond (du moins leur traduction française) et cela nuit d'une certaine manière au scénario principal. Pourquoi ? Parce que paradoxalement au script, les éléments rencontrés dans le jeu sont de base très adultes : esclavage, cupidité, avarice, famine, pauvreté. Certains évènements vous feront surement verser une larme ou deux, et l'on se surprend que de telles émotions passent à travers ce jeu.

Le vrai problème, c'est qu'il est difficile de s'attacher aux personnages tant leur design est mauvais. Passé Paul (Will), c'est le néant. Ne parlons pas non plus de leur personnalité moisie (entre la princesse superficielle reprise du cliché millénaire et l'ami inutile qui s'attire des ennuis...) Néanmoins, le jeu est beau, il n'y a qu'à voir la fluidité de l'eau pour s'en rendre compte. Certains lieux sont vraiment magnifiques (skygarden ; Freezia), d'autres sont vides et peu intéressants (les cavernes).

Un des vrais points forts du jeu est son gameplay : beaucoup plus souple que celui de Soul Blazer ; les mouvements appris au fil du jeu (glissade, torpille) augmentent vraiment l'intérêt et coupent la sensation de répétivité. Exit aussi le système d'expérience classique : vous améliorez votre attaque, votre vie et votre défense en tuant tous les monstres d'une salle. Vous l'aurez ainsi peut être deviné : les monstres ne repopent pas ; donc pas de leveling interminable dans ce jeu. Ouf.

L'évolution majeure de cet opus, c'est la capacité du héros à se métamorphoser : vous pouvez devenir un puissant chevalier ou une créature d'eau enchantée, les deux possédant des capacités bien distinctes, et un look vraiment réussi, qui transparaît avec la fadeur des rôles secondaires. Si vous trouvez pas que Chrysaor a la classe, je sais pas ce qu'il vous faut. Mais le renouvellement du gameplay a beau être assuré en combat, la linéarité d'Illusion of Time est son plus grand défaut. Sans être qualifié de couloir, le jeu ne recèle d'aucune quête annexe (j'exclus volontairement le défi des rubis de feu, pour moi c'est plus du foutage de gueule qu'autre chose...) Qui plus est, la World Map est absolument inutile, à ce point qu'elle en devient ridicule. Dommage...

Enfin, n'oublions pas de remercier le travail merveilleux du compositeur Yasuhiro Kawasaki qui a signé là une des plus belles OSTs de la SNES, et je ne dis pas ça en l'air. Les thèmes sont INOUBLIABLES, épiques, mélancoliques... et il y a une recherche d'identité sonore, marquée par les flûtes et les percussions ; c'est inoubliable je vous le répète ! Mais comme l'a souligné ce très cher hooper dans sa vidéo dédiée : pourquoi y a t'il si peu de titres ?! Le jeu n'est pas bien long mais aurait davantage gagné en puissance avec, par exemple, une musique par village, ou une musique par situation.

Illusion of Time : une ambiance, des combats, une OST... Il surpasse pour moi Terranigma par bien des égards (la nostalgie aidant), et reste mon Action-RPG favori sur la console.

Je vais conclure en musique -écoutez bien vos oreilles- et je vous ordonne de vous procurer ce jeu :

Sorti au mauvais moment, à l'heure de la Playstation et de la Saturn, Terranigma est un des derniers jeux de la SNES, et officiellement le dernier RPG de la console, ceci expliquant sa qualité graphique et sonore. Comment dire... ce jeu, il est tellement énorme que je n'ai pas envie de vous en parler... en fait, les mots sont inutiles, il faut jouer à Terranigma, il faut y jouer pour bien comprendre qu'il est énorme.

Petite anecdote personnelle : j'y ai joué pour la première fois en émulation il y a 6-7 ans et j'ai trouvé le début complètement moisi. J'avais pas accroché, je ne comprenais pas comment Terranigma pouvait prétendre être la suite d'Illusion of Time. Et puis il y a quelques années, j'ai pris mon courage à trois mains pour passer la première demi-heure de jeu/cinématique avant de me rendre compte de mon erreur.
D'ailleurs, parlons-en des cinématiques. J'avais jamais vu ça sur une SNES : toutes les capacités techniques de la console sont utilisées pour des rendus vraiment exceptionnels.

A la manière d'Illusion of Time, l'on commence l'aventure dans un petit village à l'abris de tout. Le héros, Ark, un jeune gamin turbulent qui n'hésite pas à faire chier tout le monde (Naruto spotted), gagne en intérêt pendant toute la quête. Ce qui est excellent dans cette trilogie, c'est cette manière de présenter un scénario très complexe sous des airs puérils et enfantins : Terranigma ne déroge pas à la règle et sait surprendre via des rebondissements vraiment intéressants. Je ne m'étendrai pas sur la fin du jeu, qui est l'une des plus étranges qu'il m'a été donné de voir. L'interprétation est libre, le sujet est complexe, mature, dérangeant même. Bref, j'ai pas envie de tomber dans le spoil, alors jouez-y plutôt que de perdre du temps à me lire.

Ah oui, j'allais oublier le pitch : reconstruire le monde. Ca ne vous rappelle rien ? Terranigma est bien dans la lignée de Soul Blazer et Illusion of Time, incontestablement. Des écolos avant l'heure.
Le système de combat a été revu pour un gamemplay aux petits oignons. Si les transformations ne sont plus au rendez-vous, les multiples manières de frapper rendent le jeu très dynamique, sans oublier le fait de pouvoir sauter et combiner l'attaque au saut. La magie fait son grand retour, mais elle reste anecdotique pour les 3/4 du jeu. Il est à noter un peu plus de liberté dans les déplacements, et ça, ça fait plaisir ! Certaines phases sont aussi très originales, comme la possibilité d'influencer sur l'évolution des villes du jeu. Le tout vous fera aller de surprise en surprise.

La bande-son du jeu. Et quelle bande-son. Je vous fais confiance pour aller voir les liens, ça ne sert à rien que je déblatère 110 ans sur sa magnificence :

Comme Tori, j'attends avec impatience une Review de Terranigma faite par Maître Hooper (surtout que je sais qu'il connait ce jeu, j'en ai eu la preuve en voyant l'un de ses commentaires sur un test de dailymotion niarfniarf). C'est un jeu très spécial, pas vraiment comparable à Secret of Mana. Dans tous les cas, il faut y jouer. Ou au moins écouter l'OST histoire de chialer un bon coup.

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Aussi étonnant que cela puisse paraître, ces jeux ont accompagné la SNES, de sa naissance jusqu'à sa mort, et ils l'ont accompagné d'une bien belle manière...

Une trilogie à l'ambiance décalée mais maîtrisée, aux musiques magnifiques mais peu nombreuses, aux décors enchanteurs mais un peu vides, au scénario enfantin mais en fait pas du tout. Une trilogie d'exception comme on en fait plus.