Lu Apocalypse sur Carson City Tome 6: "...Sorti des ténèbres"-Part One de Griffon.
L'apocalypse est bien là sur Carson City. Deux groupes de survivants tentent de s'organiser pour survivre aux zombies et autres créatures tentaculaires. D'un côté il y a le groupe emmené par les frères Blackwood, une bande de criminels, et de l'autre le groupe dirigé par le général Matthews. Survivre semble fortement compromis au moment où le missile Gimini est sur le point d'atteindre la ville.
Apocalypse sur Carson City est une série comme on en fait trop peu. Hommage vibrant aux films de série Z, elle est ultra-référencée, fun,décalée et gore à souhait. Ce sixième tome (l'avant-dernier) ne déroge pas à la règle et offre son content d'hémoglobine et de monstres tentaculaires se faisant sévèrement poutrer par des héros tantôt loosers, tantôt badass dont l'espérance de vie reste à déterminer. De la grande philosophie au programme donc... Mais étant donné que c'est parfaitement assumé, et surtout bien fait, l'absence de profondeur du scénario ne gêne en rien. Bien au contraire, il serait superflu et pourrait gâcher le plaisir. Le dessin est également un gros point fort de la série qui, s'il en laissera certains dubitatifs, gagnera les autres à sa cause. Dans un style noir et blanc sec, nerveux et contrasté, les personnages et leurs expressions frisent la caricature avec leurs grosses têtes disproportionnées. Et comme dans cette bande dessinée, tout est une affaire de disproportion, cela colle parfaitement.
Même si la surprise n'est plus là, ce sixième tome d'Apocalypse sur Carson City continue d'aller dans le bon sens pour tous ceux qui cherchent un univers à l'esprit nanardesque ouvertement assumé. Du plaisir à l'état brut sans prise de tête.
Lucky Luke est inquiet. Il a la désagréable sensation que Jolly Jumper le snobe. Leur duo semble mis à mal au moment le plus délicat. Le gouverneur du Texas demande au cow-boy solitaire de se rendre au pénitencier où l'un des frères Dalton a entamé une grève de la faim. Sa seule revendication est de parler seul à seul avec Lucky Luke. Où ses aventures vont-elles encore le mener?
Après l'immense succès de l'album L'homme qui a tué Lucky Luke par Matthieu Bonhomme, les éditions Dargaud avec leur collection Lucky Comics ont décidé de prolonger l'aventure en demandant de nouveaux albums vu par un auteur différent en leur laissant carte (presque) blanche. Le principe a déjà été utilisé à plusieurs reprises sur des héros différents comme Mickey Mouse ou encore Spirou. Ici, c'est Bouzard qui retrousse ses manches.
Bouzard est un auteur que j'apprécie. Ayant fait ses preuves en tant qu'auteur comique avec plusieurs maisons d'édition comme Les requins Marteaux, Six pieds sous terre, Fluide Glacial ou Dargaud, il possède un univers bien déjanté et barré.
Pour cet album de Lucky Luke, l'humour est donc bien évidemment de mise. Les références aux albums de Morris sont nombreuses, et l'auteur rend hommage au célèbre cow-boy avec tout le respect qui lui est dû. Mais c'est aussi là que le bât blesse. Là où Matthieu Bonhomme arrivait à s'affranchir des contraintes et du poids du statut culte du personnage pour se l'approprier pleinement, on sent Bouzard un peu engoncé, comme s'il se censurait de lui-même dans sa créativité.
L'album fait quand même mouche et on se marre, mais il ne marque pas. Bouzard ne va pas assez loin et ce qui fait sa force habituellement, à savoir un ton libre et un humour partant dans tous les sens, manque ici cruellement. Il faut dire que la pression n'est sûrement pas la même. S'attaquer à un monument comme Lucky Luke, ça suffirait à en bloquer plus d'un. Mais quel dommage qu'une créativité comme celle de Bouzard se retrouve ainsi bridée.
Un album agréable, certes, mais qui ne restera malheureusement pas dans les annales.
Lu Infinity 8 Tome 1 et 2 de Trondheim, Zep, Bertail et Vatine.
A bord de l'Infinity 8, vaisseau intergalactique, rien ne va plus. Au beau milieu de la galaxie, un amas d'artefacts non-identifiés de la taille d'un système solaire bloque l'avancée du vaisseau. Le capitaine, un Tonn Shär ayant la faculté d'explorer des futurs alternatifs, décide d'enclencher la procédure 8. Elle consiste à envoyer huit de ses meilleurs agents féminins dans huit boucles temporelles afin de chercher à déterminer ce qu'est réellement cet amas et s'il a une potentielle dangerosité. Chacun des agents disposera ainsi de huit heures pour tenter d'en découvrir l'origine.
Le concept de cette série de science-fiction est plutôt original et ambitieux. Chaque album, composé de trois comic books à la française sortis initialement en kiosque, propose une boucle dans le temps et une relecture des évènements avec un personnage différent. Bien évidemment, chaque boucle change radicalement suivant les actions de l'agent en question et propose ainsi une relecture décoiffante du voyage dans le temps et du fameux effet papillon. Le moindre petit évènement a des conséquences plus ou moins désastreuses pour l'avenir. Ainsi dans le premier album, l'agent Yoko Keren va se retrouver aux prises avec une bande d'aliens nécrophages, tandis que dans le second l'agent Stella Moonkicker va devoir combattre une horde de robots nazis. Vaste programme donc.
La série, prévue en huit tomes, est issue du cerveau génial de Trondheim (aidé par Zep sur le premier album)qui insuffle à ce space opéra épique et barrée une bonne dose d'humour tandis qu'Olivier Vatine (Aquablue, Cixi de Troy...) assure quant à lui la direction graphique tirant sur le pulp un brin rétro. Les dessins du premier album sont réalisés par Dominique Bertail (Shandy, L'homme-Tableau...) tandis qu'Olivier Vatine assure lui-même le second. Ainsi un dessinateur et éventuellement un co-scénariste différent travaille sur chaque tome pour insuffler à la série un large panel de traitements narratifs et graphiques. Les auteurs annoncés pour la suite sont Balez, Biancarelli, Boulet, De Felici, Guibert, Killofer, Kris, Mourier, Trystram et Vehlmann. Du lourd donc. Infinity 8 s'annonce comme la grosse série de science-fiction du moment. Calibrée pour toucher un large public, elle fait les choses bien en proposant une palette d'artistes à la mesure de son ambition. A suivre.
Lu Zombies Néchronologies Tome 3: La peste de Peru et Bervas.
Après l'apocalypse zombie, quelques scientifiques et militaires se sont réfugiés dans un petit village au Japon. Ayant découvert l'origine du virus, ils sont sur une piste sérieuse pour endiguer l'épidémie. Mais il va falloir trouver des cobayes.
Zombies, c'est un peu la réponse franco-belge à Walking Dead. Bien évidemment, cette série souffre de la comparaison et n'a pas l'aisance, la régularité, l'originalité ni le prestige de la série de Robert Kirkman, mais il s'avère qu'elle a tout de même de bonnes idées. Et ce tome offre un angle plutôt intéressant pour aborder la propagation du virus Zombie. La question de la déontologie et de la moralité est frontalement abordée tout au long de ce tome. Jusqu'où peut-on aller pour les besoins de la science? Choisir de sacrifier quelques personnes pour le bien d'un plus grand nombre n'est-il pas un but louable? En rendant possible concrètement la résolution de l'épidémie, Peru pose ainsi le trouble dans l'esprit du lecteur. Ce n'est peut-être pas très original, mais ça fonctionne.
Seule ombre au tableau, les dessins et les couleurs, assez réalistes et collant pourtant bien avec l'esprit de la série, manquent de personnalité et sont plutôt ternes.
Le fond comme la forme de ce tome de Zombies n'en font clairement pas un indispensable, mais si vous êtes plutôt réceptifs à tout ce qui touche l'univers zombie, nul doute que vous y trouverez votre compte.
Lu Undertaker Tome 3: L'Ogre de Sutter Camp de Dorison et Meyer.
Jonas Crow, alias l'Undertaker, croque-mort de son état, parcours maintenant le far-west en compagnie d'une ancienne gouvernante anglaise, Rose-Prairie, ainsi que d'une émigrée chinoise, Lin. Lors d'un enterrement, un ancien colonel reconnaît en Jonas Crow le soldat qui officiait pendant la guerre de sécession sous le pseudonyme de "Strikland". Il lui annonce que "l'ogre", un médecin à tendance psychopathe tueur en série, est toujours vivant. Crow le croyait mort depuis des années... D'anciennes plaies vont refaire surface lors de cette chasse à l'homme qui s'engage.
L'Undertaker reprend parfaitement les codes du western pour en faire une mouture finalement assez originale. Xavier Dorison, le scénariste des excellentes séries Troisième Testament ou encore de Long John Silver, excelle dans l'art de concevoir des personnages originaux possédant à la fois une part de lumière et d'ombre, loin de tout manichéisme. Le fait de prendre un croque mort et un tueur en série comme protagonistes de son histoire dans le grand Ouest américain est aussi plutôt atypique. Quand c'est servi en plus par le dessin efficace et maîtrisé de Ralph Meyer collant parfaitement avec cet univers western, c'est un vrai plaisir.
Cependant, malgré ses personnages et son traitement intéressants, l'aventure manque un peu de souffle épique et on a parfois l'impression que l'intrigue peine à décoller. L'histoire, comme la précédente, est prévue en diptyque et trouvera donc sa conclusion dans le prochain tome. Espérons que L'Undertaker retrouvera alors toute sa superbe dans cette fin d'aventure.
Lu Et il foula la terre avec légèreté de Ramadier et Bonneau.
Ethan étudie pour le compte d'une multinationale des gisements pétroliers pour savoir s'ils sont exploitables ou non. Envoyé en mission dans le nord de la Norvège suite à la découverte d'un gisement, il part quelques temps afin de repérer les lieux. Perdu dans les îles Lofoten, il est confronté à une nature brute, puissante. Au contact de ces paysages et des habitants, c'est tous les fondements intimes d'Ethan qui se retrouvent bouleversés. Le voyage professionnel se mue petit à petit en véritable quête initiatique.
Et il foula la terre avec légèreté est une bande dessinée inspirée par le philosophe Arne Naess, fondateur du mouvement de l'écologie profonde. Cette philosophie consiste à reconsidérer la place de l'homme au sein de la nature afin de vivre autrement. Avec finesse et poésie, le récit de Mathilde Ramadier met ainsi en place le questionnement d'un homme se retrouvant seul face au choc brutal d'une nature sauvage et vivante. Si Ethan se retrouve partagé entre les avantages et les inconvénients de ce projet pétrolier, l'oeuvre raconte surtout l'ouverture de sa perception au contact de la population locale ainsi que par leur manière de vivre en harmonie avec les éléments. C'est contemplatif, poétique et intelligent. L'auteure réussit à éviter tout pathos et manichéisme pour servir avec justesse son récit. Le tout est superbement mis en image par Laurent Bonneau, qui évoque grâce à son trait épais et ses couleurs peintes avec sobriété les paysages du grand nord Norvégien. Les montagnes sont saisissantes, la mer profonde, les aurores boréales magiques et les personnages respirent une certaine sérénité.
Un récit empreint de sincérité et de douceur qui sait prendre son temps dans un monde qui va de plus en plus vite.
Bludzee est un petit chat abandonné à son triste sort dans l'appartement de son propriétaire trop occupé à fuir la police pour lui prodiguer les soins les plus élémentaires. Budzee va donc devoir apprendre à se débrouiller tout seul. Et dans un premier temps, il va falloir trouver comment sortir de l'appartement pour se nourrir.
Bludzee est une bande dessinée qui ne paye pas de mine de prime abord. Avec son format à l'italienne, ses strips offrant des gags sur une page et le dessin simpliste et anthropomorphe de Trondheim, on s'attend pas à ce que le bouzin casse des briques.
Mais c'est sans compter sur l'imagination débridée de Trondheim! Bludzee nous emmène en effet dans des coins complètement inattendus. Tout en gardant une cohérence, il arrive à tenir son rythme du gag par page en réussissant à faire prendre à son récit une direction totalement inattendue. Les gags du petit chat mignon virent très vite au cynisme et à l'humour noir. Je ne vais pas spoiler, mais il est pratiquement impossible de deviner ce que va devenir le chaton. C'est barré, jouissif et vraiment drôle.
Bien sûr, ce n'est pas la bande dessinée du siècle, mais Trondheim cherche sans prétention à divertir et amuser son lectorat et y arrive admirablement bien. On se marre de bon coeur, et ça fait du bien. Bludzee, une bd qui fait du bien par où ça passe :p
Lu Comment je ne suis pas devenu moine de Jean-Sébastien Bérubé.
Devenir un moine bouddhiste est-il à la portée de tous?
Depuis qu'il est petit, Jean-Sébastien est passionné par le bouddhisme et la culture tibétaine. Après des études de dessin à l'université de Québec, il décide de quitter son Canada natal dans le but de réaliser au Tibet une formation lui permettant de devenir moine bouddhiste. Mais une fois sur place, c'est la désillusion. Sa version romantique et idéalisée du bouddhisme se retrouve mise à mal par la réalité du terrain.
Jean-Sébastien Bérubé livre un récit autobiographique intime. En expliquant simplement sa démarche et l'idéal vers lequel il tend, il s'expose complètement et à nu au lecteur de manière très troublante. Le style de dessin employé, post-belge et en noir et blanc, est empreint de sincérité et de simplicité, comme le propos.
Parfaitement au fait de la culture tibétaine, ayant appris plus que correctement les rudiments de la langue et épousant parfaitement la philosophie bouddhiste, Jean-Sébastien semble prêt. Pourtant, loin d'être la terre promise, terreau de spiritualité et de sagesse, c'est une terre dévastée par la pauvreté, la pollution, la corruption, l'ignorance, la superstition qui s'offre à lui. Loin d'être une inspiration de philosophie et de sagesse, Bouddha et le dalai-lama semblent être des stars du rock. Et il y a l'occupation chinoise du Tibet, bien plus complexe qu'il n'y paraît...
Mais ce choc de la réalité permet ainsi au jeune homme une réelle introspection. Par petites touches, il apprend ainsi auprès de la population ce qui constitue un être humain et expérimente la "vraie" culture tibétaine. La naïveté et la désillusion font petit à petit place à une réelle force de caractère et maturité. Et s'il en ressort déçu par rapport à ses premières ambitions, il en ressort grandit. Dans un sens, le but de son voyage est accompli.
En 1964, en Argentine sous les traits de Quino, naît Mafalda, une héroïne de strips à caractère plutôt politisé. Elleest aujourd'hui connu dans le monde entier et est partciulièremet populaire en Amérique du Sud.
Mafalda est une petite fille à tendance légèrement dépressive et franchement pessimiste qui commente sous forme de strips l'actualité de l'époque. En les relisant, ça peut sembler gentillet, mais l'actualité de l'époque, c'était la dictature. A noter d'ailleurs que l'éditeur de Mafalda est mort sous la torture.
Mais il n'y a pas que Mafalda qui s'inquiète de l'avenir du monde. Il y a aussi les amis de Mafalda qui sont à mourir de rire et emblématiques des maux de l'époque. Il y a Manolito qui est le garçon le plus capitaliste et cupide qui soit, Susanita qui est une petite fille ne désirant que se marier et servir son futur mari, Felipe, grand stressé devant l'éternel, Miguelito qui ne voit pas plus loin que le bout de son nombril... Bref, tout une galerie de portraits permettant de croquer avec humour le monde de ces enfants issus des classes moyennes de l'Argentine.
L'humour est subtil et s'il met des enfants en scène, il s'adresse plutôt à un public adulte. Le dessin, d'un style assez simple et caricatural, fonctionne bien pour ce type d'humour et Quino possède une palette d'expressions pour ses personnages assez surprenante.
Le plus surprenant au final, c'est de constater que 50 ans après, les réflexions et les gags de Mafalda sont d'une incroyable actualité. Rien n'a fondamentalement changé en 50 ans dans le monde. Et quelque part, même si on en rit grâce à Mafalda et ses amis, c'est plutôt inquiétant...
Lu Doggybags Tome 13 de Run, Mojo, Hutt, Calla et Rosset.
13eme et dernier numéro de la série Doggybags.
Comme d'habitude le bouquin propose 3 aventures d'inspiration Pulp.
La première aventure, Slaughter House Blues, raconte les déboires d'un ex-flic corrompu dans une ville isolée peuplée uniquement par d'ex-victimes de crimes.
La deuxième, intitulée Killer Klowns from Da Hood raconte une chasse aux clowns un soir d'Halloween qui tourne mal.
Et enfin, la troisième, Times Scare, relate le pétage de plomb d'un flic, déguisé en Cookie Monster, dans Times Square.
Le tout est enrobé de mini-récits, fausses pubs, enquêtes, carnets de croquis et autres surprises.
C'est toujours sympa de retrouver l'univers violent et sans concession de Doggybags. L'ambiance qui se dégage de ce comic book est assez unique et si vous êtes amateur de récit pulp avec des relents d'horreur, de suspense et de frissons, alors ces albums sont faits pour vous. Vous ne les regretterez pas même si, fatalement, certaines histoires plairont plus que d'autres. D'ailleurs, ce dernier tome est assez décevant à ce niveau là. Seule Times Scare tire son épingle du jeu, les deux autres étant sympas mais plutôt anecdotiques. Pour un dernier tome, ça la fout un peu mal.
Heureusement, les nombreux bonus valent le coup. Les mini-récits comme le carnet de croquis sont bien foutus et valent le coup d'oeil. C'est un aspect assez plaisant d'ailleurs dans Doggybags ce côté album-tiroir-fourre-tout qui donne vraiment l'impression de tenir entre ses mains un objet à la croisée entre le magazine et la bd. Doggybags, c'est donc fini, mais qu'on se rassure! Devant le succès de leur série, l'équipe en charge du bouzin, dirigée par Run, cherche à décliner le concept. Tant mieux!
Lu Apocalypse sur Carson City Tome 6: "...Sorti des ténèbres"-Part One de Griffon.
L'apocalypse est bien là sur Carson City. Deux groupes de survivants tentent de s'organiser pour survivre aux zombies et autres créatures tentaculaires. D'un côté il y a le groupe emmené par les frères Blackwood, une bande de criminels, et de l'autre le groupe dirigé par le général Matthews. Survivre semble fortement compromis au moment où le missile Gimini est sur le point d'atteindre la ville.
Apocalypse sur Carson City est une série comme on en fait trop peu. Hommage vibrant aux films de série Z, elle est ultra-référencée, fun,décalée et gore à souhait. Ce sixième tome (l'avant-dernier) ne déroge pas à la règle et offre son content d'hémoglobine et de monstres tentaculaires se faisant sévèrement poutrer par des héros tantôt loosers, tantôt badass dont l'espérance de vie reste à déterminer. De la grande philosophie au programme donc... Mais étant donné que c'est parfaitement assumé, et surtout bien fait, l'absence de profondeur du scénario ne gêne en rien. Bien au contraire, il serait superflu et pourrait gâcher le plaisir. Le dessin est également un gros point fort de la série qui, s'il en laissera certains dubitatifs, gagnera les autres à sa cause. Dans un style noir et blanc sec, nerveux et contrasté, les personnages et leurs expressions frisent la caricature avec leurs grosses têtes disproportionnées. Et comme dans cette bande dessinée, tout est une affaire de disproportion, cela colle parfaitement.
Même si la surprise n'est plus là, ce sixième tome d'Apocalypse sur Carson City continue d'aller dans le bon sens pour tous ceux qui cherchent un univers à l'esprit nanardesque ouvertement assumé. Du plaisir à l'état brut sans prise de tête.
Lu Jolly Jumper ne répond plus de Bouzard.
Lucky Luke est inquiet. Il a la désagréable sensation que Jolly Jumper le snobe. Leur duo semble mis à mal au moment le plus délicat. Le gouverneur du Texas demande au cow-boy solitaire de se rendre au pénitencier où l'un des frères Dalton a entamé une grève de la faim. Sa seule revendication est de parler seul à seul avec Lucky Luke. Où ses aventures vont-elles encore le mener?
Après l'immense succès de l'album L'homme qui a tué Lucky Luke par Matthieu Bonhomme, les éditions Dargaud avec leur collection Lucky Comics ont décidé de prolonger l'aventure en demandant de nouveaux albums vu par un auteur différent en leur laissant carte (presque) blanche. Le principe a déjà été utilisé à plusieurs reprises sur des héros différents comme Mickey Mouse ou encore Spirou. Ici, c'est Bouzard qui retrousse ses manches.
Bouzard est un auteur que j'apprécie. Ayant fait ses preuves en tant qu'auteur comique avec plusieurs maisons d'édition comme Les requins Marteaux, Six pieds sous terre, Fluide Glacial ou Dargaud, il possède un univers bien déjanté et barré.
Pour cet album de Lucky Luke, l'humour est donc bien évidemment de mise. Les références aux albums de Morris sont nombreuses, et l'auteur rend hommage au célèbre cow-boy avec tout le respect qui lui est dû. Mais c'est aussi là que le bât blesse. Là où Matthieu Bonhomme arrivait à s'affranchir des contraintes et du poids du statut culte du personnage pour se l'approprier pleinement, on sent Bouzard un peu engoncé, comme s'il se censurait de lui-même dans sa créativité.
L'album fait quand même mouche et on se marre, mais il ne marque pas. Bouzard ne va pas assez loin et ce qui fait sa force habituellement, à savoir un ton libre et un humour partant dans tous les sens, manque ici cruellement. Il faut dire que la pression n'est sûrement pas la même. S'attaquer à un monument comme Lucky Luke, ça suffirait à en bloquer plus d'un. Mais quel dommage qu'une créativité comme celle de Bouzard se retrouve ainsi bridée.
Un album agréable, certes, mais qui ne restera malheureusement pas dans les annales.
Lu Infinity 8 Tome 1 et 2 de Trondheim, Zep, Bertail et Vatine.
A bord de l'Infinity 8, vaisseau intergalactique, rien ne va plus. Au beau milieu de la galaxie, un amas d'artefacts non-identifiés de la taille d'un système solaire bloque l'avancée du vaisseau. Le capitaine, un Tonn Shär ayant la faculté d'explorer des futurs alternatifs, décide d'enclencher la procédure 8. Elle consiste à envoyer huit de ses meilleurs agents féminins dans huit boucles temporelles afin de chercher à déterminer ce qu'est réellement cet amas et s'il a une potentielle dangerosité. Chacun des agents disposera ainsi de huit heures pour tenter d'en découvrir l'origine.
Le concept de cette série de science-fiction est plutôt original et ambitieux. Chaque album, composé de trois comic books à la française sortis initialement en kiosque, propose une boucle dans le temps et une relecture des évènements avec un personnage différent. Bien évidemment, chaque boucle change radicalement suivant les actions de l'agent en question et propose ainsi une relecture décoiffante du voyage dans le temps et du fameux effet papillon. Le moindre petit évènement a des conséquences plus ou moins désastreuses pour l'avenir. Ainsi dans le premier album, l'agent Yoko Keren va se retrouver aux prises avec une bande d'aliens nécrophages, tandis que dans le second l'agent Stella Moonkicker va devoir combattre une horde de robots nazis. Vaste programme donc.
La série, prévue en huit tomes, est issue du cerveau génial de Trondheim (aidé par Zep sur le premier album)qui insuffle à ce space opéra épique et barrée une bonne dose d'humour tandis qu'Olivier Vatine (Aquablue, Cixi de Troy...) assure quant à lui la direction graphique tirant sur le pulp un brin rétro. Les dessins du premier album sont réalisés par Dominique Bertail (Shandy, L'homme-Tableau...) tandis qu'Olivier Vatine assure lui-même le second. Ainsi un dessinateur et éventuellement un co-scénariste différent travaille sur chaque tome pour insuffler à la série un large panel de traitements narratifs et graphiques. Les auteurs annoncés pour la suite sont Balez, Biancarelli, Boulet, De Felici, Guibert, Killofer, Kris, Mourier, Trystram et Vehlmann. Du lourd donc.
Infinity 8 s'annonce comme la grosse série de science-fiction du moment. Calibrée pour toucher un large public, elle fait les choses bien en proposant une palette d'artistes à la mesure de son ambition. A suivre.
Lu Zombies Néchronologies Tome 3: La peste de Peru et Bervas.
Après l'apocalypse zombie, quelques scientifiques et militaires se sont réfugiés dans un petit village au Japon. Ayant découvert l'origine du virus, ils sont sur une piste sérieuse pour endiguer l'épidémie. Mais il va falloir trouver des cobayes.
Zombies, c'est un peu la réponse franco-belge à Walking Dead. Bien évidemment, cette série souffre de la comparaison et n'a pas l'aisance, la régularité, l'originalité ni le prestige de la série de Robert Kirkman, mais il s'avère qu'elle a tout de même de bonnes idées. Et ce tome offre un angle plutôt intéressant pour aborder la propagation du virus Zombie. La question de la déontologie et de la moralité est frontalement abordée tout au long de ce tome. Jusqu'où peut-on aller pour les besoins de la science? Choisir de sacrifier quelques personnes pour le bien d'un plus grand nombre n'est-il pas un but louable? En rendant possible concrètement la résolution de l'épidémie, Peru pose ainsi le trouble dans l'esprit du lecteur. Ce n'est peut-être pas très original, mais ça fonctionne.
Seule ombre au tableau, les dessins et les couleurs, assez réalistes et collant pourtant bien avec l'esprit de la série, manquent de personnalité et sont plutôt ternes.
Le fond comme la forme de ce tome de Zombies n'en font clairement pas un indispensable, mais si vous êtes plutôt réceptifs à tout ce qui touche l'univers zombie, nul doute que vous y trouverez votre compte.
Lu Undertaker Tome 3: L'Ogre de Sutter Camp de Dorison et Meyer.
Jonas Crow, alias l'Undertaker, croque-mort de son état, parcours maintenant le far-west en compagnie d'une ancienne gouvernante anglaise, Rose-Prairie, ainsi que d'une émigrée chinoise, Lin. Lors d'un enterrement, un ancien colonel reconnaît en Jonas Crow le soldat qui officiait pendant la guerre de sécession sous le pseudonyme de "Strikland". Il lui annonce que "l'ogre", un médecin à tendance psychopathe tueur en série, est toujours vivant. Crow le croyait mort depuis des années... D'anciennes plaies vont refaire surface lors de cette chasse à l'homme qui s'engage.
L'Undertaker reprend parfaitement les codes du western pour en faire une mouture finalement assez originale. Xavier Dorison, le scénariste des excellentes séries Troisième Testament ou encore de Long John Silver, excelle dans l'art de concevoir des personnages originaux possédant à la fois une part de lumière et d'ombre, loin de tout manichéisme. Le fait de prendre un croque mort et un tueur en série comme protagonistes de son histoire dans le grand Ouest américain est aussi plutôt atypique. Quand c'est servi en plus par le dessin efficace et maîtrisé de Ralph Meyer collant parfaitement avec cet univers western, c'est un vrai plaisir.
Cependant, malgré ses personnages et son traitement intéressants, l'aventure manque un peu de souffle épique et on a parfois l'impression que l'intrigue peine à décoller. L'histoire, comme la précédente, est prévue en diptyque et trouvera donc sa conclusion dans le prochain tome. Espérons que L'Undertaker retrouvera alors toute sa superbe dans cette fin d'aventure.
Lu Et il foula la terre avec légèreté de Ramadier et Bonneau.
Ethan étudie pour le compte d'une multinationale des gisements pétroliers pour savoir s'ils sont exploitables ou non. Envoyé en mission dans le nord de la Norvège suite à la découverte d'un gisement, il part quelques temps afin de repérer les lieux. Perdu dans les îles Lofoten, il est confronté à une nature brute, puissante. Au contact de ces paysages et des habitants, c'est tous les fondements intimes d'Ethan qui se retrouvent bouleversés. Le voyage professionnel se mue petit à petit en véritable quête initiatique.
Et il foula la terre avec légèreté est une bande dessinée inspirée par le philosophe Arne Naess, fondateur du mouvement de l'écologie profonde. Cette philosophie consiste à reconsidérer la place de l'homme au sein de la nature afin de vivre autrement. Avec finesse et poésie, le récit de Mathilde Ramadier met ainsi en place le questionnement d'un homme se retrouvant seul face au choc brutal d'une nature sauvage et vivante. Si Ethan se retrouve partagé entre les avantages et les inconvénients de ce projet pétrolier, l'oeuvre raconte surtout l'ouverture de sa perception au contact de la population locale ainsi que par leur manière de vivre en harmonie avec les éléments. C'est contemplatif, poétique et intelligent. L'auteure réussit à éviter tout pathos et manichéisme pour servir avec justesse son récit. Le tout est superbement mis en image par Laurent Bonneau, qui évoque grâce à son trait épais et ses couleurs peintes avec sobriété les paysages du grand nord Norvégien. Les montagnes sont saisissantes, la mer profonde, les aurores boréales magiques et les personnages respirent une certaine sérénité.
Un récit empreint de sincérité et de douceur qui sait prendre son temps dans un monde qui va de plus en plus vite.
Lu Bludzee de Lewis Trondheim.
Bludzee est un petit chat abandonné à son triste sort dans l'appartement de son propriétaire trop occupé à fuir la police pour lui prodiguer les soins les plus élémentaires. Budzee va donc devoir apprendre à se débrouiller tout seul. Et dans un premier temps, il va falloir trouver comment sortir de l'appartement pour se nourrir.
Bludzee est une bande dessinée qui ne paye pas de mine de prime abord. Avec son format à l'italienne, ses strips offrant des gags sur une page et le dessin simpliste et anthropomorphe de Trondheim, on s'attend pas à ce que le bouzin casse des briques.
Mais c'est sans compter sur l'imagination débridée de Trondheim! Bludzee nous emmène en effet dans des coins complètement inattendus. Tout en gardant une cohérence, il arrive à tenir son rythme du gag par page en réussissant à faire prendre à son récit une direction totalement inattendue. Les gags du petit chat mignon virent très vite au cynisme et à l'humour noir. Je ne vais pas spoiler, mais il est pratiquement impossible de deviner ce que va devenir le chaton. C'est barré, jouissif et vraiment drôle.
Bien sûr, ce n'est pas la bande dessinée du siècle, mais Trondheim cherche sans prétention à divertir et amuser son lectorat et y arrive admirablement bien. On se marre de bon coeur, et ça fait du bien. Bludzee, une bd qui fait du bien par où ça passe :p
Lu Comment je ne suis pas devenu moine de Jean-Sébastien Bérubé.
Devenir un moine bouddhiste est-il à la portée de tous?
Depuis qu'il est petit, Jean-Sébastien est passionné par le bouddhisme et la culture tibétaine. Après des études de dessin à l'université de Québec, il décide de quitter son Canada natal dans le but de réaliser au Tibet une formation lui permettant de devenir moine bouddhiste. Mais une fois sur place, c'est la désillusion. Sa version romantique et idéalisée du bouddhisme se retrouve mise à mal par la réalité du terrain.
Jean-Sébastien Bérubé livre un récit autobiographique intime. En expliquant simplement sa démarche et l'idéal vers lequel il tend, il s'expose complètement et à nu au lecteur de manière très troublante. Le style de dessin employé, post-belge et en noir et blanc, est empreint de sincérité et de simplicité, comme le propos.
Parfaitement au fait de la culture tibétaine, ayant appris plus que correctement les rudiments de la langue et épousant parfaitement la philosophie bouddhiste, Jean-Sébastien semble prêt. Pourtant, loin d'être la terre promise, terreau de spiritualité et de sagesse, c'est une terre dévastée par la pauvreté, la pollution, la corruption, l'ignorance, la superstition qui s'offre à lui. Loin d'être une inspiration de philosophie et de sagesse, Bouddha et le dalai-lama semblent être des stars du rock. Et il y a l'occupation chinoise du Tibet, bien plus complexe qu'il n'y paraît...
Mais ce choc de la réalité permet ainsi au jeune homme une réelle introspection. Par petites touches, il apprend ainsi auprès de la population ce qui constitue un être humain et expérimente la "vraie" culture tibétaine. La naïveté et la désillusion font petit à petit place à une réelle force de caractère et maturité. Et s'il en ressort déçu par rapport à ses premières ambitions, il en ressort grandit. Dans un sens, le but de son voyage est accompli.
Fini Mafalda, Intégrale 50 ans de Quino.
En 1964, en Argentine sous les traits de Quino, naît Mafalda, une héroïne de strips à caractère plutôt politisé. Elleest aujourd'hui connu dans le monde entier et est partciulièremet populaire en Amérique du Sud.
Mafalda est une petite fille à tendance légèrement dépressive et franchement pessimiste qui commente sous forme de strips l'actualité de l'époque. En les relisant, ça peut sembler gentillet, mais l'actualité de l'époque, c'était la dictature. A noter d'ailleurs que l'éditeur de Mafalda est mort sous la torture.
Mais il n'y a pas que Mafalda qui s'inquiète de l'avenir du monde. Il y a aussi les amis de Mafalda qui sont à mourir de rire et emblématiques des maux de l'époque. Il y a Manolito qui est le garçon le plus capitaliste et cupide qui soit, Susanita qui est une petite fille ne désirant que se marier et servir son futur mari, Felipe, grand stressé devant l'éternel, Miguelito qui ne voit pas plus loin que le bout de son nombril... Bref, tout une galerie de portraits permettant de croquer avec humour le monde de ces enfants issus des classes moyennes de l'Argentine.
L'humour est subtil et s'il met des enfants en scène, il s'adresse plutôt à un public adulte. Le dessin, d'un style assez simple et caricatural, fonctionne bien pour ce type d'humour et Quino possède une palette d'expressions pour ses personnages assez surprenante.
Le plus surprenant au final, c'est de constater que 50 ans après, les réflexions et les gags de Mafalda sont d'une incroyable actualité. Rien n'a fondamentalement changé en 50 ans dans le monde. Et quelque part, même si on en rit grâce à Mafalda et ses amis, c'est plutôt inquiétant...
Lu Doggybags Tome 13 de Run, Mojo, Hutt, Calla et Rosset.
13eme et dernier numéro de la série Doggybags.
Comme d'habitude le bouquin propose 3 aventures d'inspiration Pulp.
La première aventure, Slaughter House Blues, raconte les déboires d'un ex-flic corrompu dans une ville isolée peuplée uniquement par d'ex-victimes de crimes.
La deuxième, intitulée Killer Klowns from Da Hood raconte une chasse aux clowns un soir d'Halloween qui tourne mal.
Et enfin, la troisième, Times Scare, relate le pétage de plomb d'un flic, déguisé en Cookie Monster, dans Times Square.
Le tout est enrobé de mini-récits, fausses pubs, enquêtes, carnets de croquis et autres surprises.
C'est toujours sympa de retrouver l'univers violent et sans concession de Doggybags. L'ambiance qui se dégage de ce comic book est assez unique et si vous êtes amateur de récit pulp avec des relents d'horreur, de suspense et de frissons, alors ces albums sont faits pour vous. Vous ne les regretterez pas même si, fatalement, certaines histoires plairont plus que d'autres. D'ailleurs, ce dernier tome est assez décevant à ce niveau là. Seule Times Scare tire son épingle du jeu, les deux autres étant sympas mais plutôt anecdotiques. Pour un dernier tome, ça la fout un peu mal.
Heureusement, les nombreux bonus valent le coup. Les mini-récits comme le carnet de croquis sont bien foutus et valent le coup d'oeil. C'est un aspect assez plaisant d'ailleurs dans Doggybags ce côté album-tiroir-fourre-tout qui donne vraiment l'impression de tenir entre ses mains un objet à la croisée entre le magazine et la bd.
Doggybags, c'est donc fini, mais qu'on se rassure! Devant le succès de leur série, l'équipe en charge du bouzin, dirigée par Run, cherche à décliner le concept. Tant mieux!